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21 mai 2013

Le chômage des jeunes peu qualifiés, une urgence à traiter


Dans une agence Pole emploi de Nice. REUTERS/Eric Gaillard

Le chômage des jeunes est un problème que l’on rencontre aujourd’hui dans la plupart des pays développés. La France ne fait pas exception, mais elle présente quelques particularités qui demandent des réponses adaptées.

Dans une première approche, on peut considérer le chômage des jeunes comme une conséquence malheureuse mais difficilement évitable du problème plus général d’un taux de chômage élevé dans l’ensemble de la population.

Quand les entreprises anticipent un ralentissement de leur activité, elles commencent par arrêter les embauches avant d’envisager, le cas échéant, de se séparer de certains de leurs salariés. Les nouveaux venus sur le marché du travail sont ceux qui subissent le plus directement tous les soubresauts de la conjoncture.

Si on se limite à cette analyse, on est tenté de conclure que le seul remède est le retour de la croissance et l’amélioration générale des perspectives d’embauche.
Un problème spécifique

Pourtant, on risque alors de passer à côté de certains aspects essentiels du problème. La succession de crises que nous traversons depuis 2007 a certes des conséquences dramatiques: en France métropolitaine, alors que le taux de chômage est monté globalement à 10,2%, il s’élève selon les statistiques du quatrième trimestre 2012 à 25,7% pour les 15-24 ans. Mais ce dernier chiffre ne peut être considéré comme un simple accident de parcours: il n’est jamais revenu au-dessous de 15% depuis plus de trente ans (depuis le premier trimestre 1982). Manifestement, le problème a une forte composante structurelle; on ne peut simplement compter sur un regain de croissance pour le résoudre.

Il ne semble pas y avoir une fatalité à laquelle personne n’échapperait. Ainsi que le souligne une note du Conseil d’analyse économique (CAE) publiée en avril dernier, «la France a un problème spécifique avec l’emploi des jeunes. A seulement 30%, le taux d’emploi des 15-24 ans est deux fois plus faible qu’au Danemark, 1,5 fois plus faible qu’au Royaume-Uni, aux Etats-Unis ou en Allemagne».
Des jeunes à la dérive

Ces jeunes qui ne travaillent pas pourraient suivre des études ou être en formation, mais ce n’est pas cela qui distingue la France. Ce qui est préoccupant, c’est la proportion de «NEET» (selon l’acronyme anglais de «Not in Education, Employment or Training»); ces jeunes qui ne sont nulle part représentent en moyenne sur la dernière décennie 15,1% des 15-29 ans, chiffre le plus élevé de tous les pays de l’OCDE après l’Italie, l’Espagne et la Grèce. Et, ajoutent les économistes du CAE, «plus grave encore, environ la moitié de ces jeunes, soit 900.000, ne cherchent pas d’emploi. Ils sont à la dérive».

Cette situation est d’autant plus préoccupante que toutes les études montrent que ceux qui ont du mal à s’insérer dans le monde du travail continueront toute leur vie à rencontrer plus de difficultés que les autres. Ceux qui commencent par le chômage risquent davantage de le rencontrer ensuite. Il faut donc agir. Mais comment? Sur ce point, les différentes recommandations des économistes (de l’OCDE, du CAE ou d’autres organismes) permettent de dégager quelques lignes de force.
Pour une extension du RSA...

D’abord, un constat: la France n’a pas de politique sociale en direction des jeunes. Ils peuvent bénéficier des prestations familiales accordées aux parents ou d’aides au logement. Mais, constate l’OCDE, «les jeunes majeurs sans enfants se trouvent quasiment exclus du principal dispositif d’aide sociale, l’allocation de revenu minimum (le revenu de solidarité active, RSA), éligible pleinement à partir de 25 ans seulement. Ce traitement de défaveur est assez unique dans la zone OCDE, l’aide sociale étant ouverte aux jeunes à partir de 18 ans dans tous les pays à l’exception de l’Espagne, la France et le Luxembourg».

Une extension du RSA aux jeunes serait d’autant plus efficace qu’elle serait soumise à conditions (recherche d’emploi, formation qualifiante). La création d’une «garantie jeunes» annoncées par Jean-Marc Ayrault en décembre 2012 dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté va incontestablement dans la bonne direction, mais elle ne concernera que 100.000 jeunes de 18 ans à 24 ans, soit seulement 10% des «NEET» de cette tranche d’âge.
…et la réforme de l’enseignement

Une autre action s’impose, c’est la réforme du système éducatif. La France lui consacre une part de sa richesse comparable à celle de la moyenne des pays de l’OCDE, pour des résultats globalement en ligne avec ceux des autres, sauf sur un point essentiel : « en France, les inégalités des chances semblent plus prononcées qu’ailleurs, note l’OCDE. L’influence de l’origine sociale sur les performances scolaires des enfants a augmenté et se trouve parmi les plus élevées des pays de l’OCDE ». Corriger ce travers implique une action déterminée dès les premières années de scolarité. Vincent Peillon a raison de mettre l’accent sur le primaire, mais les effets de cette réforme indispensable ne seront pas visibles avant plusieurs années.

D’autres actions, de court terme cette fois, s’imposent. Le précédent gouvernement avait lancé un plan d’urgence pour l’emploi des jeunes entre avril 2009 et décembre 2010. Le gouvernement actuel a lancé les emplois d’avenir et les contrats de génération. Les économistes du CAE souhaiteraient que les emplois d’avenir soient davantage encouragés dans le secteur privé, où les perspectives d’emploi sont plus importantes que dans le secteur associatif. Ils souhaiteraient aussi que plus de moyens soient consacrés aux formations dans les écoles de la deuxième chance (au nombre de 70) et dans les 20 centres de l’EPIDE (Etablissement public d’insertion de la défense).
L’épineuse question du smic

Enfin, restent les sujets qui fâchent. D’abord, la question de la dualité des contrats en France, entre CDI d’une part et CDD, travail temporaire, de l’autre. On va dans la bonne direction avec l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 sur la sécurisation de l’emploi, mais il reste encore du chemin à parcourir pour combler le fossé entre emplois stables et précaires.

Ensuite, la question du smic, trop élevé pour favoriser l’emploi des jeunes non qualifiés. Depuis la fâcheuse expérience d’Edouard Balladur avec le contrat d’insertion professionnelle, plus personne n’ose évoquer l’idée d’un smic jeune. Alors on essaie de contourner l’obstacle, comme les économistes du CAE qui proposent de concentrer les allègements de charges sociales sur les bas salaires.

Mais il ne faut pas se leurrer, on ne fera pas l’économie d’un nouveau débat sur le sujet. En Allemagne, où le problème est beaucoup moins aigu qu’en France, le travail de la moitié des jeunes peu qualifiés coûte moins cher (hors apprentissage) que le smic français. Il semble difficile de faire comme si cette solution n’existait pas.

Gérard Horny

Article également paru sur Emploiparlonsnet
relayé par slate.fr

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