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2 févr. 2012

Compétitivité-emploi, sauvetages et duperies

Photo: Le Monde
Nicolas Sarkozy et François Fillon veulent tourner la page des 35 heures avant l'élection présidentielle. Lors de son entretien télévisé, dimanche 29 janvier, le président a demandé aux partenaires sociaux d'ouvrir des discussions en vue de la mise en place d'accords compétititvité-emploi. Le lendemain, le premier ministre a précisé l'invitation dans un courrier envoyé aux organisations syndicales et au patronat, en expliquant que les discussions doivent porter sur "les modalités de négociation, de validité et de durée" des accords de compétitivité, ainsi que sur les"garanties en termes de maintien et de développement de l'emploi".

M. Fillon a précisé qu'il leur fixe un délai de deux mois pour parvenir à un accord interprofessionnel. A défaut, le gouvernement prendra "ses responsabilités" en"déposant un projet de loi ". Les syndicats ont fait connaître immédiatement leurs réticences sur le calendrier proposé et leur oppostion au projet. Pour eux, il n'est pas question de se laisser "instrumentaliser par le pouvoir politique", comme le disait au
Monde, lundi, Marcel Grignard, secrétaire général adjoint de la CFDT.Vantés par le Medef – et particulièrement soutenus par l'UIMM, sa principale branche industrielle – les accords compétitivité-emploi ont été testés, depuis quelques années. L'idée était simple : permettre aux entreprises de négocier le temps de travail des salariés en fonction de l'activité du moment ou des carnets de commande, et obtenir soit une réduction du salaire, soit une augmentation du temps de travail, en échange d'une garantie de maintien des emplois.

Aujourd'hui, ce type d'accord, échangeant salaire contre emploi, doit être négocié dans les entreprises et recueillir, selon les termes de la loi de 2008, l'assentiment des syndicats représentatifs. Il doit faire l'objet d'un accord individuel de chaque salarié, sous forme d'avenant à son contrat de travail.

Une dizaine de sociétés y ont eu recours, ces dernières années. Avec plus ou moins de succès. Chaque camp a ses exemples, les brandissant comme autant d'illustrations de la bonne marche de "l'outil d'ajustement", pour le Medef, ou de "l'accord de dupes", pour les syndicats.
Les "sauveurs"

Bosch à Vénissieux (Rhône). Le cas semble presque idéal. En 2005, l'usine du groupe allemand produisait des pompes d'injection diesel qui devenaient dépassées. La chaîne de montage et l'usine étaient menacées d'obsolescence. Afin d'éviter la fermeture, les syndicats proposent une réduction des coûts salariaux en échange d'investissements. Après la perte de six jours de RTT, une diminution de la rémunération du travail de nuit et le blocage des salaires durant trois ans, les syndicats obtiennent l'engagement de la direction de maintien et de développement du site.

L'accord est renouvelé en 2010, cette fois pour l'investissement dans de nouvelles chaînes de montage de matériel photovoltaïque. Fati Chaabani, secrétaire des syndicats CFDT de la métallurgie du Rhône, reconnaît que 400 postes ont été perdus en cinq ans, soit la moitié de ses effectifs. Mais il ne regrette rien car,"sinon, on serait fermés aujourd'hui". Le cabinet Syndex fait remarquer que la conversion industrielle a été réussie grâce "à la pratique du dialogue social" de l'entreprise allemande.


Poclain Hydraulique à Verberie (Oise). C'est une grosse PME picarde qui, en mars 2009, doit faire face à un carnet de commandes en berne et à une baisse de 43 % du chiffre d'affaires. Le patron, Laurent Bataille, propose alors un coktail complet de mesures "pour éviter les licenciements", raconte-t-il : prises de congés anticipées, chomâge partiel, réduction du temps de travail et baisse des salaires."La solution a été travaillée avec les conseillers juridiques de l'UIMM", note M. Bataille.

Les syndicats suivent, et l'accord est validé. Il durera juqu'en décembre 2009. Ces quelques mois ont permis à la PME de relancer son activité et ses bénéfices. "J'ai pu embaucher par la suite", insiste M. Bataille. Les salariés eux, "ont le sentiment que leurs efforts ne sont pas suffisamment récompensés quand des bénéfices ont été distribués en partie aux actionnaires dès l'année suivante", remarque Laurent Rivoire du cabinet conseil Secafi Alpha.
Les accords mi-figue mi-raisin

Général Motors à Strasbourg (Bas-Rhin). En juillet 2010, après la faillite du géant américain General Motors, la nouvelle direction de l'usine affirme vouloir abaisser ses coûts de main-d'œuvre pour une reprise de l'activité. En échange d'un carnet de commandes assuré jusqu'en 2014, elle obtient l'abandon de 6 jours de RTT sur 16, le gel des salaires durant deux ans et la suppression de la prime d'intéressement jusqu'en 2013. Les salariés, consultés, se prononcent à 70 % pour.

Les syndicats soutiennent le compromis, exceptée la CGT majoritaire sur le site. Mais la direction de la centrale syndicale, génée par le vote majoritaire des salariés, se refuse à exercer son droit d'opposition. "On a refusé de signer une régression du droit, mais on ne peut pas s'opposer aux salariés", explique la centrale. Un mois après la signature de l'accord, une partie des salariés, s'estimant floués, se mettaient en grève contre la "dégradation des conditions de travail" et des suppressions de postes.

Goodyear, deux usines, deux lignes syndicales. En 2007, la direction du groupe américain Goodyear qui a racheté les pneus Dunlop, demande aux salariés de ses deux usines d'Amiens des "efforts" pour faire face à la crise. Ici, c'est avec le passage d'équipes en trois huit au quatre huit que l'entreprise veut obtenir la réduction des coûts : les 35 heures seront ainsi calculées annuellement. En contrepartie, le PDG s'engage à augmenter ses investissements et à garder les emplois. Si l'accord n'est pas signé, il menace de fermer les deux usines.

Ceux du site d'Amiens Sud (ex-Dunlop) acceptent et quatre syndicats signent l'accord début 2009 (CGT,CFDT,FO et CGC). "On a préféré éviter la menace de fermeture", explique Claude Dimoff, ancien délégué CGT, qui reconnaît que le "seul côté positif" ont été les investissements industriels. Les ouvriers d'Amiens Nord, emmenés par la CGT, ont refusé le compromis à 87 %. La direction refuse d'investir et projette de fermer le site. Elle n'y est pas arrivée depuis deux ans, la CGT menant une guérilla juridique. "On nous menace depuis deux ans de plan social, mais on est en février 2012 et il n'a toujours pas eu lieu", raconte Mickaël Wamen, délégué CGT Goodyear.
Les accords repoussoirs

Continental à Clairoix (Oise). C'est devenu le symbole brandi par le syndicats et la gauche radicale comme exemple de promesses non tenues par le patronat. En 2007, confrontée à un ralentissement de son activité, la direction du groupe allemand veut faire baisser de 8 % le coût de sa masse salariale. Les deux sites français réagissent différemment. L'usine du groupe de Clairoix accepte le compromis, qui fait passer le temps de travail de 35 à 40 heures avec une hausse de salaire de 92 euros. Le groupe allemand promet que le site sera maintenu et ses carnets de commandes remplis jusqu'en 2012. Mars 2009, coup de tonnerre : la direction annonce la fermeture du site. Le conflit va durer deux ans.

A l'inverse, sur le site de Toulouse les syndicats majoritaires (CGT et CFDT) ont fait de la résistance, et le plan a été retiré.

Peugeot Motocycles. Le groupe français a décidé de délocaliser partiellement la production de ses scooters en Chine. Pour maintenir la "compétitivité" des sites français, la direction propose, en 2008, aux syndicats de signer un accord qui revient sur les 35 heures. Les syndicats acceptent de rogner la moitié des RTT, et les 1 100 salariés des usines de Mandeure (Doubs) et de Danmarie (Haut-Rhin) voient leur temps de pause supprimées, le tout sans compensation salariale. En échange, promesse leur est faite de construire le nouveau modèle de scooter un an plus tard.

Aujourd'hui, les chaînes tournent au ralenti, et les deux-roues sont produits en Chine. La direction a annoncé la fermeture d'un site et des supressions d'emplois sur l'autre. "On met les salariés comme les syndicats devant un choix inacceptable : se tirer une balle dans la jambe gauche ou bien celle de droite", dénonce Maurad Rabhi, responsable de l'emploi à la CGT.Sylvia Zappi.

Source: LeMonde.fr

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