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11 mai 2015

Comment gouverner le peuple par le Chaos.

Gouverner par le chaos - Ingénierie sociale et mondialisation est un essai publié chez Max Milo Éditions en 2010 (couverture noire) et réédité en 2014 (couverture blanche). La seconde édition est augmentée d’avant-propos où l’auteur explique ses raisons de cultiver un anonymat relatif, ainsi que le rôle central de la furtivité et de l’invisibilité dans les méthodes de contrôle que le nouveau Big Brother applique de son côté pour « pirater » les esprits et gouverner par la crise et le chaos dirigé, en particulier dans le terrorisme d’État

Il est rare de proposer une analyse aussi riche en aussi peu de mots sur une réalité aussi vaste. Il s’agit, ni plus ni moins, du devenir global de l’ensemble des hommes de la planète, de l’avenir du vivant ainsi que du devenir de nos cerveaux, ou du moins de ce qu’il en reste.

Le tout, passé par la moulinette de ce «gouvernement par le chaos» organisé et mis en place sous nos yeux.

Tout est démontré au moyen de très courts chapitres de quelques pages; reste, pour celui qui veut vérifier les affirmations de cet essai, de prendre les références et de lire les livres, ou de réfléchir par lui-même, pour constater le bien fondé des analyses proposées.

Tout commence par l’«ordo ab chao». A savoir la pantalonnade organisée à l’aube du 11 novembre 2008, qui vit 150 policiers de la Bac encercler Tarnac, village de 350 habitants du plateau des Millevaches pour arrêter neuf jeunes gens en rupture de civilisation et qui semblaient les rédacteurs du manifeste «L’insurrection qui vient». Auparavant, les lignes SNCF avaient été l’objet d’un certain nombre de sabotages toujours inexpliqués aujourd’hui au demeurant… Il y avait à l’époque un très célèbre criminologue, ancien GM du Grand Orient, et qui s’est fait une spécialiste de voir des terroristes partout où cela peut être utile pour aider l’État à organiser une politique répressive des libertés publiques et individuelles.

Ainsi l’auteur de l'ouvrage estime que des techniques de manipulations furent à l’œuvre lors de cette affaire et élargit son propos sur un certain nombre de techniques mises en place dès le début du XXe siècle mais qui pourraient même remonter à des temps plus anciens, ainsi il cite Sun Tzu qui considère que « Tout l'art de la guerre est basé sur la duperie ».

C’est donc dans une société qui méprise la réalité, qui fonctionne sur le mensonge que nous serions en train de vivre. Le chaos ne serait donc plus ce que rejette le gouvernement, mais ce qui lui permet de se maintenir au pouvoir et d’accroître sa capacité de contrôle. Nous pouvons songer à quelques exemples récents : l’insécurité est un moyen de justifier la mise en place de la vidéo-surveillance, la loi anti-burqa un moyen d’empêcher tout individu de se masquer le visage, le téléchargement illégal un moyen de justifier le contrôle d’internet, l’usurpation d‘identité une justification à la mise en place les passeports biométriques, le vol favorise le pouvoir des banques (qui gardent l’argent) et l’utilisation de la carte bancaire (munie d’une puce électronique), etc… L’ouvrage démontre aussi rapidement que la crise actuelle est une volonté politico-financière pour augmenter le contrôle social et politique de la finance (ce qui rejoint l’analyse de Michel Drac) comme ce fut toujours le cas et la prise de contrôle de certains organismes financiers (comme JP Morgan, ce qui rejoint ici l’analyse de Pierre Jovanovic).

L’homme : une machine comme une autre

En décryptant l’ingénierie sociale, l’auteur nous démontre que les apprentis-sorciers du Nouvel Ordre Mondial considèrent l’être humain comme une machine que l’on peut reprogrammer à souhait en usant d’un certain nombre de techniques. Pour ce faire, différentes disciplines sont employées dans le domaine politique ou médiatique pour manipuler l’opinion : « le marketing, le management, la robotique, le cognitivisme, la psychologie sociale et behaviouriste (comportementale), la programmation neurolinguistique (PNL), le storytelling, le Social Learning, le reality-building. » (p.19)

C’est un véritable musée des horreurs que dépeint l’ouvrage où toutes les stratégies les plus machiavéliques sont mises au point pour manipuler et contrôler les populations en recourant le moins possible à la violence. L’auteur n’hésite pas à utiliser les termes de « piratage » et de « hacking » pour parler de processus visant à modifier totalement, voire à violer, l’esprit et la pensée des individus. Le terme d’ « ingénierie sociale » qui fait l’objet d’un chapitre et qui revient fréquemment est d’ailleurs assez révélateur puisque théoriquement l’ingénieur travaille sur des machines, du « non-vivant » alors qu’il s‘agit pour ceux qui nous gouvernent de travailler sur des êtres vivants. De fait, nous ne sommes pas surpris à la fin de l’ouvrage de lire quelques considérations sur le transhumanisme dans le chapitre « Le biopouvoir ».

Le refus des limites et la volonté de dissoudre non seulement tous les groupes humains, mais l’Homme lui-même semble être l’objectif du Nouvel Ordre Mondial. Une société de zombies reprogrammés par la pensée unique et dirigés par un gouvernement global au sein du « village global ». L’auteur n’est absolument pas dupe de cette volonté affichée par certains individus comme Attali, Minc ou Brzezinski (mentionnés dans le livre) et n’hésite pas à montrer les dangers qui nous guettent à voir se dissoudre la famille, le clan, la tribu ou la nation. Il considère que la frontière est essentielle à l’être humain dans son acception polysémique. C’est l’introduction du chapitre Tittytainment qui attire ici notre attention : « Les architectes** de la mondialisation l’ont parfaitement compris : pour être vraiment efficace, la fabrique du consentement [NDLR : titre chapitre précédent] suppose l’abolition de toutes les frontières. En effet, c’est le maintien de frontières, à tous les niveaux de l’existence, qui rend possible la comparaison, la contradiction, la possibilité de dire « non » et tout le jeu de la dialectique qui s‘ensuit. C’est aussi le maintien de frontières qui appuie le protectionnisme économique, nécessaire si l’on souhaite conserver l’autonomie matérielle et l’indépendance intellectuelle qu’elle permet. » Nous ne pouvons que souscrire à cette réflexion. Dans un autre passage du livre, l’auteur poursuit ce raisonnement à propos du corps humain. La peau (l’épiderme) est la frontière entre l’intériorité et le monde extérieur, l’environnement, cette « frontière naturelle » est ce qui permet à chacun de conserver une part de secret, et c’est cette part de secret, constitutive de notre identité, et source d’imprévu, qui est intolérable pour le Système, qui cherche donc à valoriser au maximum la mise en place de l’identité numérique. Nous ne pouvons que nous désoler de voir autant de prétendus « militants radicaux » épancher leurs faiblesses de cœur ou revendiquer leurs actions sur certains réseaux sociaux, ce qui constitue du pain béni pour le Système qui n’a plus qu’à se créer un simple compte pour contrôler, se renseigner, faire pression et agir.

Je considère souvent que ce « refus des limites », des frontières, propre à certaines mouvances « politiques », est le signe d’un esprit profondément puéril, celui de l’enfant refusant l’interdit et refusant les règles. Je suis donc assez satisfait de lire dans cet ouvrage un certains nombres de pages bien menées qui montre que le Nouvel Ordre Mondial a besoin d‘infantiliser les populations, de les faire revenir à un stade préœdipien. Songeons à l’usage en politique du terme « pédagogie », qui signifie étymologiquement « l’art d’éduquer les enfants », et montre la façon dont nous sommes considérés par nos gouvernants. Cette infantilisation, doublée d’une forte individualisation, contribue à l’effritement du groupe et à l’abaissement des capacités de raisonnement, et donc à l’abandon du politique.

Le chapitre intitulé « La théorie de la jeune-fille » est à ce titre fort intéressant et oppose des principes jeunistes et féministes (encouragés par le NOM***) à des principes hiérarchiques et phalliques. Exprimé ainsi, cela peut paraître un peu « caricatural », je vous invite donc à vous plonger dans ces quelques considérations. Ce chapitre fait suite à celui sur le « Management négatif » qui se conclut entre autre par les théories de Lacan : « Chez Lacan, les groupes humains peuvent se comprendre dans les termes de la logique ensembliste, ou théorie mathématique des ensembles. Lacan distingue au moins quatre modes d’organisation, modes relationnels qu’il appelle des discours : le discours du maître, où le chef domine : le discours de l’hystérique, où l’individu domine : le discours universitaire, où le savoir domine : le discours analytique ; où l’incertitude domine. (Lacan a aussi mentionné une fois dans œuvre un cinquième discours, celui du capitaliste, qui nous semble être une variante de celui de l’hystérique). La formation d‘un ensemble humain, donc l’organisation d’un groupe, requiert de soumettre les individus à une hiérarchie verticale, à un discours du maître, une autorité, une Loi, un phallus symbolique en position d’exception par rapport aux membres du groupe. » Pour ma part, et à la suite de certaines réflexions au sein de l’ouvrage, il me semble important que le discours du maître soit soutenu par le discours du savant.

Au-delà du constat, auquel je souscris pleinement, j’adhère à une bonne partie des réflexions formulées par l’auteur. Cependant certains aspects sont à discuter

Une critique : lutte des classes et question ethnique

Influencé par l’ultra-gauche, l’ouvrage se fait donc au fur et à mesure un plaidoyer pour la lutte des classes et s’avère plutôt critique sur la question ethnique.

Nous ne nions pas la possibilité d’une lutte des classes, d’ailleurs, la citation du milliardaire Warren Buffett, présente dans l’ouvrage, est édifiante « Il y a une lutte des classes, évidemment, mais c'est ma classe, la classe des riches qui a mené la lutte. Et nous sommes en train de gagner. ». Pour l’auteur, la question ethnique ferait son irruption dans la politique française à la suite de l’action combinée à partir de 1983 du Front national d’un côté, qui exacerberait cette question et de SOS Racisme de l’autre qui en ferait un nouveau combat social. L’auteur précise également que la question ethnique n’a jamais eu une grande importance en France. Le but de cette question « secondaire » serait de détourner de la lutte des classes. J’apporterai un bémol à ses réflexions.

Tout d’abord, il est vrai qu’autant le FN que la gauche et l’extrême-gauche ont utilisé la question ethnique a des fins électorales. Concernant la gauche, le rapport récent de Terra Nova est un aveu. La gauche s’est débarrassée des classes populaires autochtones au profit des « jeunes », des homosexuels et des immigrés, groupes sociaux pouvant être considérés par eux comme des « minorités ». Le tournant libéral de la gauche coïncide astucieusement avec cette stratégie. Afin de masquer son « à-plat-ventrisme » face au Capital, la gauche a agité le hochet de l’anti-racisme. Dans le cas du FN, et dans ce qu’il est convenu d‘appeler médiatiquement « l’extrême-droite », cette question ne saurait relever d’un simple « calcul » politique. Historiquement, les mouvements dits « nationalistes » voire « fascistes » ont toujours compté une portion congrue de non européens (ce fut le cas lors du 6 février 1934, ce fut le cas au sein du PPF, de la LVF puis après guerre du PFN ou d’Occident). Le nationaliste français n’a jamais été un racisme primaire à la sauce amerloque. Cependant, cette question a cessé d’être secondaire lorsque le Capital a utilisé la main d‘œuvre étrangère contre la main d’œuvre autochtone. L’afflux de millions d’allogènes a déplacé cette question « secondaire » (y compris chez les nationalistes) comme devenant une question centrale. Il est impossible aujourd’hui de nier, même pour un marxiste ou un anarchiste sérieux, que la question ethnique est devenue importante, tant elle est facteur de désordre, désordre voulu pour déstabiliser le « marché du travail », autant que la cohésion sociale, ou tout simplement pour créer de nouvelles formes de « stratégie de la tension » (Occident vs Islam, par exemple). Dans ce qu’on appelait jadis le Tiers-Monde, la reconquête contre les puissances coloniales capitalistes est souvent passée par une quête identitaire (indigénisme sud-américain, souvent catholique, nationalisme hindou, panarabisme, bouddhisme, etc…). D’ailleurs l’auteur ne s’y trompe pas puisqu’il considère bien que le NOM veut détruire les structures traditionnelles… Bien que seulement 1% du livre concerne cette question, il m’a semblé important de faire quelques commentaires. Aussi cela prépare une fin qui ressemble à un soufflet au fromage s’effondrant sur lui-même, un délire sur le CNR et un appel des anciens résistants (dont les sinistres Aubrac et le médiatique Hessel) à s’engager (contre le NOM). On peut émettre autant de réserve qu’on veut sur les régimes totalitaires (particulièrement sur les lobbies pharmaceutiques et chimiques allemands), cela n’empêche pas de rester lucide. Comme le montre bien l’auteur, l’essentiel de ce projet mortifère est un produit des milieux anglo-saxons, et ce bien avant la Seconde Guerre mondiale. Nous n’avons pas souvenir que les « résistants » se soient opposés à cette époque, puis au cours de leur existence à l’influence des milieux anglo-saxons… A l’inverse d’un certain Ezra Pound, qui l’aura chèrement payé.Bernard Stiegler pense que les sociétés humaines sont en train de passer d’un «Sur moi symbolisé par la Loi» à un «Sur moi automatisé de contrainte technologique pure» après avoir transité par le «Sur moi émotionnel de la société du Spectacle». Beaucoup croient que nous en sommes toujours au deuxième, voire même au premier stade, du moins si l’on en croit les trémolos de la voix du ministre Valls lorsqu’il évoque la République comme une sorte de divinité devant laquelle il convient de s’agenouiller, l’arrière train levé bien haut. La politique est devenue «l’art d’automatiser les comportements sans discussion» alors même que «la clé de voûte» de l’élaboration du sens commun «est directement attaqué par cette mutation».

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