Il y a quelques semaines, Karim* était à Homs. Régulièrement, il fait
l'aller-retour entre le Liban, où il travaille, et son village natal,
Aaliyat, près de la grande ville syrienne. Aaliyat est un village
chrétien, et pour le défendre, certains habitants ont pris les armes. « Nous
sommes un groupe de 88 personnes, toutes chrétiennes de rite
grec-catholique, qui gardons notre village », explique le jeune homme de
24 ans à L'Orient-Le Jour.
« Cela fait huit mois que nous sommes armés,
plus précisément depuis que nous avons reçu des menaces des villages
sunnites voisins, du Front al-Nosra et de l'Armée syrienne libre (ASL). À
Pâques, l'année dernière, poursuit le jeune Syrien, le Front al-Nosra
et l'ASL ont attaqué Dibeh, un village voisin qui aurait, depuis, été
repris par les forces gouvernementales. Les rebelles « voulaient passer
par notre village dans la foulée, mais après un échange de tirs, ils ont
changé de route », assure-t-il.
Selon Karim, les armes, légères, ont été fournies par le régime de
Bachar el-Assad. « Nous avons un accord avec le gouvernement : il nous
donne armes et permis, nous limitons notre mission au périmètre du
village », dit-il. Quatre check-points ont été installés dans le
village. Chaque soir, des hommes y montent la garde. Parmi eux, le
prêtre, « le premier à monter au front », rit Karim. « Lui aussi est
armé, il est très politisé et a des liens avec Bachar el-Assad »,
poursuit-il plus sérieusement.
Aaliyat n'est pas le seul village
chrétien syrien à avoir pris des mesures d'autodéfense. Selon Karim, les
syriaques, grecs-catholiques et grecs-orthodoxes à Fayrouzeh ont, eux
aussi, pris les armes. Et dans la région de Wadi el-Nasara, à l'ouest de
Homs, un homme qui a de bonnes relations avec le gouvernement a armé
les chrétiens. Cette région abrite de nombreux couvents, dont ceux de
Mar Gerios et de Mar Élias.
« Dès 2011 (le début de la révolte
contre Assad), se sont constituées des forces d'autodéfense dans
certaines régions chrétiennes de Syrie, à Wadi el-Nasara, dans le
Qalamoun et à Qamichli. Le régime les a encouragées », explique à
L'Orient-Le Jour Frédéric Pichon, chercheur associé à l'Université de
Tours et spécialiste de la Syrie. L'auteur de Syrie : pourquoi
l'Occident s'est trompé précise qu'il « s'agit de milices constituées de
chrétiens et non de milices chrétiennes au sens où elles auraient reçu
un
quelconque appui ou soutien de la hiérarchie ecclésiastique ».
Ponctuellement, poursuit-il, des chrétiens armés se sont joints à
l'armée syrienne pour la défense de certains villages, comme Saadnaya,
ou la reconquête d'autres, comme Maaloula, à l'automne dernier.
Source:lorientlejour.com
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