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3 août 2013

En Iran, le président Rohani entre en fonctions

Le président Hassan Rohani (au centre), le 14 juillet, au parlement iranien à Téhéran.
Pas d'état de grâce pour Hassan Rohani, le nouveau président iranien, élu, à la surprise générale, dès le premier tour de l'élection présidentielle en juin. Jamais un dirigeant iranien en temps de paix n'a eu à affronter une telle somme de défis, tant internes qu'internationaux. 

Isolé diplomatiquement et soumis à des sanctions sans précédent, son pays est sous la menace d'une guerre lancée par Israël et les Etats-Unis afin de mettre fin à son programme nucléaire clandestin. A l'intérieur, la crise économique se double d'un divorce politique entre le régime et une partie de la population.



Quatre jours avant l'intronisation de M. Rohani, qui a eu lieu samedi 3 août, par le Guide suprême Ali Khamenei, la Chambre des représentants américaine a adopté le Nuclear Iran Prevention Act qui, s'il était confirmé par le Sénat en septembre, sanctionnerait tous les clients des secteurs pétrolier, automobile, minier et industriel iraniens et achèverait de détruire l'économie iranienne.

Ce vote fait plus que contrebalancer l'assouplissement, annoncé le 25 juillet par le Trésor américain, des achats de matériel médical par Téhéran. Surtout, ce nouveau train de sanctions, s'il se confirme, risque d'obérer les velléités négociatrices d'Hassan Rohani, dont la marge de manoeuvre est déjà étroite.

Ayant fait campagne contre l'intransigeance et l'isolement international, incarnés par l'actuel négociateur nucléaire Saïd Jalili, M. Rohani a la réputation d'être un diplomate pragmatique et modéré. En 2003, il avait négocié une suspension des activités nucléaires iraniennes avec une troïka européenne regroupant la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni. Mais la situation a bien changé depuis : d'ici moins d'un an au rythme actuel, l'Iran aura enrichi assez de matière fissile pour fabriquer une bombe et il aurait lancé les travaux d'un réacteur sur le site de Warak permettant d'obtenir du plutonium, nécessaire à la bombe H. La méfiance n'a fait que grandir et les positions se sont rigidifiées. A tel point que l'ensemble des dirigeants des pays européens, invités à la prestation de serment de M. Rohani, dimanche, ont décliné.

PLUS DE "TRANSPARENCE" ET "ENTENTE CONSTRUCTIVE"

La fenêtre pour une éventuelle négociation avant la "ligne rouge" fixée par Israël est donc très étroite. M. Rohani a promis plus de "transparence" et d'oeuvrer à une "entente constructive" mais a exclu une suspension unilatérale de l'enrichissement de l'uranium. Toute décision en matière nucléaire et dans les négociations avec l'Occident devra, de toute façon, recueillir l'assentiment du Guide, principal décideur en la matière.

Le succès de M. Rohani dépendra donc de ses relations avec Ali Khamenei, que l'on dit bonnes. En matière de politique étrangère, sa volonté de réconciliation avec les pays du Golfe pourrait être entravée par le soutien iranien inconditionnel à Damas : Téhéran vient de signer un accord prévoyant la livraison de 3,5 milliards de dollars (2,6 milliards d'euros] de produits pétroliers en échange d'investissements en Syrie.

Pour autant, les écueils ne manquent pas. M. Rohani est réputé proche de l'ancien président Hachemi Rafsandjani, qu'une sourde rivalité oppose au Guide et qui a été empêché de se présenter à la présidentielle de juin. M. Rafsandjani sera-t-il un président bis ou une éminence grise, ce qui ne manquerait pas de compliquer les processus de décision à Téhéran ? Le nouveau gouvernement, qui sera annoncé après la prestation de serment du président devant le Parlement, dimanche, devrait donner de premières indications.

D'après les fuites dans les médias iraniens, il devrait compter nombre de technocrates compétents et respectés ayant déjà servi sous les présidences de MM. Rafsandjani (1989-1997) et Khatami (1997-2005) : c'est le cas du ministre du pétrole, Bijan Namdar Zanganeh, du probable responsable des affaires étrangères, Mohamed Javad Zarif, et de Mohamed Forouzandeh, un ancien ministre de la défense qui devrait prendre la tête du Conseil suprême de la sécurité nationale. Le dossier nucléaire pourrait passer sous la responsabilité directe du président. Enfin, Ali Janati, le fils d'un ultraconservateur, est pressenti pour la culture et la guidance islamique.

L'ÉCONOMIE IRANIENNE EXSANGUE SOUS L'EFFET DES SANCTIONS

Après huit ans d'incompétence brouillonne sous la houlette de Mahmoud Ahmadinejad, les Iraniens espèrent que la nouvelle équipe saura atténuer l'effet des sanctions sur l'économie iranienne, qui souffre d'une inflation supérieure à 40 %, de recettes pétrolières en chute de moitié et d'une devise ayant perdu 80 % de sa valeur.

Sur le plan intérieur, M. Rohani est aussi très attendu. Il a beaucoup promis pendant sa campagne, notamment de lever la censure sur Internet, d'améliorer les droits des minorités ainsi que les libertés publiques, de fairecesser le harcèlement des femmes par la police religieuse. "Un gouvernement fort ne signifie pas un gouvernement qui interfère et intervient dans tous les domaines. Ce n'est pas un gouvernement qui entrave la vie des gens", a-t-il ainsi déclaré peu après son élection, confirmant les immenses espoirs placés en lui.

Il reste un dernier point potentiellement explosif. Elu notamment grâce à l'électorat des réformateurs Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, candidats malheureux à la présidentielle de 2009 et maintenus en résidence surveillée depuis février 2011, M. Rohani a une dette envers eux et leurs partisans. A chacun de ses meetings électoraux, des militants du "mouvement vert" ont brandi les portraits des deux leaders maintenus au secret. Sans prendre d'engagement précis, le candidat Rohani s'était prononcé pour la libération de tous les prisonniers politiques, qui seraient 800 selon les estimations les plus sérieuses.

De réelles avancées en la matière contribueraient assurément à réconcilier partiellement la société avec le régime et à guérir les blessures de 2009. Mais, tant sur la question des prisonniers politiques que celle du nucléaire, Hassan Rohani va devoircompter avec la surveillance tatillonne d'un Parlement ultraconservateur.

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