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16 juin 2013

Un portrait inédit de Richelieu en vente pour la première fois

Une toile retrouvée en Italie par un historien de l'art et attribuée à Charles-Alphonse Dufresnoy sera mise aux enchères le 24 juin, à Drouot..

On le sent impatient, excité par sa découverte qu'il brûle de raconter. Dans une maison de Reggio, en Émilie-Romagne (Italie), Christophe Castandet a découvert un portrait en pied de Richelieu. C'est l'archétype de Philippe de Champaigne(1602-1674), qui a peint le modèle exposé au Louvre. Sauf que la singularité du décor, avec un lion, un serpent et un léopard auxquels le cardinal inspire le respect, laisse à penser que ce tableau a été peint par un autre. Et effectivement, il serait dû à Charles-Alphonse Dufresnoy (1611-1668), selon Sylvain Kerspern, l'historien de l'art qui a mené l'enquête.

Sa note explicative qui occupe cinq pages du catalogue de vente est digne d'un musée. Sylvain Kerspern est un spécialiste en la matière. En 2011, il a participé à l'exposition «Richelieu à Richelieu», cosignant dans le beau livre de l'événement un chapitre sur le décor peint dans son château disparu du Poitou, où l'on apprend que le cardinal s'est servi du pinceau comme outil au service de son action et de sa gloire. Deux notions induites dans le tableau mis en vente. Ce ne sont au départ qu'impressions. Des réflexions qui se bousculent dans l'esprit du commissaire-priseur de 35 ans apercevant, «dans une grande pièce fermée par un rideau de velours rouge, la toile ovale faiblement éclairée, au-dessus d'une console encadrée de bustes en marbre d'empereurs romains», raconte-t-il avec emphase et l'œil qui frise.

«Comment cette effigie d'un personnage aussi important de l'histoire de France peut-elle se retrouver dans une petite ville d'Émilie-Romagne?», se demande Christophe Castandet. Le jeune commissaire parisien a fait le voyage en Italie à la demande du propriétaire, un fantasque collectionneur italien à l'âge vénérable, pour l'inventaire de deux natures mortes. Vittorio Preda, l'expert en dessins et tableaux anciens de sa maison de ventes, Artemisia Auctions, est là et tout aussi fasciné. «Dans la grande galerie qu'a rêvée Louis-Philippe à Versailles, Richelieu occupe, entre Clovis et Louis XIV, une des premières places!», s'enflamme le commissaire. Les deux professionnels oublient les natures mortes dont ils ont déjà reçu les photos.

Ce portrait du cardinal est inédit. Richelieu n'a pas laissé d'inventaire, aucune perte ou disparition d'œuvre le concernant n'a été signalée. Et cette peinture n'aurait jamais fait l'objet d'une transaction financière. Le propriétaire n'est pas dupe, «il sait que Richelieu fut un personnage majeur de l'État français, affirme le commissaire. C'est un industriel érudit, un grand œil qui a vécu en France. Il nous dit que ce tableau est chez lui depuis une trentaine d'années, qu'il l'a acquis auprès d'une vieille famille de Provence, qu'il lui a toujours porté chance», poursuit Christophe Castandet.


«Comment cette effigie d'un personnage aussi important de l'histoire de France peut-elle se retrouver dans une petite ville d'Émilie-Romagne ?»Christophe Castandet

Huit heures vont lui être nécessaires pour convaincre l'Italien de vendre le tableau. Puis, il faudra quarante jours pour obtenir l'autorisation de sortie du territoire de l'œuvre, estimée entre 60.000 et 80.000 euros, délivrée par la Surintendance italienne, équivalent de notre ministère de la Culture. Sans attendre le précieux sésame, l'enquête sur la genèse de l'œuvre s'enclenche, confiée à Sylvain Kerspern. Son enthousiasme est immédiat. Durant des mois, l'historien de l'art va écumer les sites de passage des ducs de Richelieu, des Archives nationales au Palais-Cardinal.

Les résultats sont éloquents. L'historien de l'art y développe une démonstration en trois parties commme un conférencier. D'abord: «le rapport au modèle de Champaigne», le portraitiste privilégié de Richelieu. Rien n'échappe à son examen: ni la tête tournée vers le spectateur, ni la position de la main droite montrant la barrette cardinalice, ni le corps noyé dans l'ampleur de sa robe rouge, ni l'analyse du drapé au dessin aménagé ici pour s'intégrer à un décor naturel. Or, ce cadre naturel intrigue Sylvain Kerspern qui lui consacre le deuxième volet de son étude, «le respect des animaux ou l'allégorie d'un pouvoir dominé».

«Devant le cardinal impassible, un lion respectueux et un serpent s'écartent ; derrière lui, dans la grotte, un léopard d'aspect féroce, sorti de son terrier, baisse la tête au spectacle du ministre en gloire», écrit-il. C'est la politique de Richelieu au service de la France face aux puissances étrangères qui se trouverait le plus directement mise en évidence».

Troisième élément déterminant quant au contexte et la datation: «Le paysage italianisant dans le goût des Carrache et du Dominiquin». Ce paysage, inspiré de Poussin, en ferait une œuvre posthume. En outre, comparé au style de Philippe de Champaigne «les teintes sont plus froides et les coloris plus sonores, à la bolonaise», poursuit Sylvain Kerspern. Il nous éclaire enfin sur le peintre à qui il attribue le tableau: Charles-Alphonse Dufresnoy, qui fut très proche du petit-neveu du cardinal, Armand Jean de Vignerot du Plessis (1639-1715), «longtemps figure énigmatique de la peinture française, internationalement reconnu du monde de l'art par son traité, presque inconnu par son pinceau».

Artemisia Auctions, dessins et tableaux anciens. Exposition au 12 Drouot jusqu'au 19 juin. Vente le 24 juin, à 14 h 30, à Drouot, salle 14. Tél.: 01 40 15 99 55 et www.artemisia-auctions.com




source : lefigaro.fr

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