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13 déc. 2012

Hongrie : « Les Juifs, une menace pour la sécurité nationale » ?

Une déclaration d’un député d’extrême-droite suscite le tollé à droite comme à gauche.Il est un pays en Europe où un député peut estimer qu’il est « grand temps d'évaluer le nombre des membres d'origine juive du gouvernement ou du Parlement » parce qu’ils « représentent une certaine menace pour la sécurité nationale». Ce pays est la Hongrie et le député, Marton Gyöngyösi (prononcé Dieunedieuchi), membre du parti d’extrême-droite Jobbik. 

Devant le scandale provoqué par cette déclaration, faite le 26 novembre, dans l’enceinte du Parlement de Budapest, le député a expliqué qu’il avait été mal compris et que sa proposition ne visait que les citoyens possédant la double nationalité hongroise et israélienne. 

Ce parti a recueilli près de 17% des voix lors des législatives de 2010 – soit 850 000 suffrages. Il a obtenu 47 députés sur un total de 386, qui siègent dans l’opposition au gouvernement de droite. Au sein de la galaxie de l’extrême-droite européenne, le Jobbik occupe une place très particulière : il est essentiellement antisémite. Dans un entretien à la revue française Politique internationale (printemps 2011), ce même Gyöngyösi expliquait benoitement avoir « des preuves formelles qu'Israël est en train d'acheter la Hongrie ». Et d’ajouter que son parti,«nationaliste radical », « désapprouve le discours islamophobe » des autres partis d’extrême-droite européens. 

La sortie de Gyöngyösi a provoqué un sursaut dans le pays. Une semaine plus tard, près de 10 000 personnes manifestaient contre l’antisémitisme devant le Parlement à l’appel à tous les autres partis : le Fidesz (conservateur, au pouvoir), le parti socialiste et le Rassemblement 2014 de centre gauche. Le Premier ministre Viktor Orban (droite) a également déclaré qu’« aussi longtemps que je serai à ce poste, personne en Hongrie ne pourra être attaqué pour sa foi, sa conviction ou son origine. Nous protégerons nos compatriotes juifs.» 

Un manifestant devant le Parlement, à Budapest, le 2 décembre - anos Marjai/AP/SIPA
Une unanimité rare dans un pays traversé par des clivages politiques violents, qui opposent un pouvoir de droite nationaliste et populiste et une gauche libérale plutôt liée aux milieux d’affaires. Les tentations autoritaires du pouvoir de Viktor Orban sont bien réelles, mais le confondre avec l’extrême-droite, c’est ne rien comprendre à ce qu’un historien hongrois, Istvan Bibo, appelait « la misère des petits Etats d’Europe de l’Est ». 

Le Jobbik antisémite est l’héritier des Croix fléchées, parti nazi hongrois, qui fut installé au pouvoir par les Allemands en octobre 1944, après que ceux-ci eurent renversé le régent Horthy, après avoir pris son fils en otage. Depuis 1920, l’amiral Horthy était à la tête d’un régime conservateur, nationaliste, autoritaire et antisémite, allié de l’Allemagne. Un régime né de la destruction du Royaume de Hongrie, par le traité de Trianon (1920) – le pays fut amputé des deux tiers de sa superficie – et des contrecoups de l’échec de la révolution communiste de 1919. 

Mais confondre le régime de Horthy – dont la droite aujourd’hui au pouvoir est, en partie, l’héritière – et les Croix fléchées nazies – modèle non assumé du Jobbik – est un contresens historique. Jusqu’en 1944, la Hongrie était l’un des rares pays d’une Europe nazifiée, où les Juifs de nationalité hongroise (1), juridiquement discriminés, vivaient dans une relative sécurité et où le parti social-démocrate siégeait au Parlement. 

Près de soixante-dix ans plus tard, la réaction des partis démocratiques, droite et gauche confondues, à la sortie de Gyöngyösi est une excellente nouvelle. Elles sont suffisamment rares dans ce pays pour qu’on puisse s’en réjouir. 

(1) Les Juifs étrangers réfugiés en Hongrie furent livrés aux Allemands, déportés, puis assassinés dès l‘été 1941.

Source: Marianne

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