Alors que Washington presse l'Albanie d'accueillir l'arsenal chimique syrien pour organiser sa destruction sur son sol, d'autres pays membres de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) sollicitent également, selon RFI, la France et la Belgique. Plusieurs autres pays, sollicités par les Etats-Unis, ont déjà refusé, notamment la Norvège.
La Convention sur l'interdiction des armes chimiques est pourtant claire : il est formellement interdit de déplacer ces produits. Sur le principe, il est donc hors de question de voir les bombes et autres agents chimiques de l'arsenal syrien traverser les frontières du pays. Seulement voilà, la résolution adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies comporte une clause permettant de contourner cet obstacle. Il y est écrit noir sur blanc qu'il faut privilégier «l'urgence et l'efficacité».
Pour organiser la destruction de l'arsenal syrien, les Etats-Unis sollicitent l'Albanie : un choix réfléchi. Tirana étudie l'offre américaine attentivement mais n'a pas encore donné de réponse officielle pour le moment.
En effet, l'Albanie présente certains avantages, notamment géographiques, en raison de sa proximité et de la facilité d'un possible transport des stocks par voie maritime. En outre, elle dispose d'une expérience particulière dans le domaine de la neutralisation d'arsenal chimique. En 2007, elle a été le premier pays à détruire son propre arsenal chimique.
Ces stocks - près de 16 tonnes, notamment du gaz moutarde de facture ancienne –- auraient été importés dans les années 1970 d'une provenance non spécifiée. Ils ont été découverts fin 2002 dans des bunkers à quelques dizaines de kilomètres de Tirana, parmi les centaines de milliers d'abris construits au cours des décennies précédentes dans tout le pays. La destruction des stocks avait été financée par les Etats-Unis, à hauteur de 35 millions d'euros. Le département de la défense américain avait supervisé l'opération.
Prudence du gouvernement albanais
Dans le cas de l'arsenal syrien, toutefois, l'ampleur des stocks à éradiquer et les conditions de sécurité en Albanie posent un défi d'une autre ampleur. Or, le temps presse pour Washington. L'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a annoncé que ses inspecteurs, arrivés en Syrie il y a un mois, avaient placé des scellés sur l'ensemble du stock de 1 000 tonnes d'agents chimiques et de 290 tonnes d'armes chimiques déclaré par Damas.
Le conseil exécutif de l'OIAC doit déterminer un calendrier d'ici au 15 novembre. Officiellement, Washington reste optimiste sur la capacité à respecter l'échéance du 30 juin 2014, date butoir à laquelle la destruction devra être achevée. Pour l'heure, le gouvernement albanais reste très prudent dans son expression. Il est confronté à une équation complexe. Investi premier ministre le 15 septembre, après la victoire de son parti aux élections législatives de juin, le socialiste Edi Rama veut préserver l'orientation atlantiste et pro-européenne de son pays.
Figurant parmi les Etats les plus pauvres d'Europe, l'Albanie a besoin de soutiens occidentaux. Mais d'autres considérations entrent aussi en ligne de compte et expliquent l'absence de réponse publique, depuis plusieurs jours, à la demande américaine. En effet, deux jours après son entrée en fonction officielle, Edi Rama a décidé d'interdire l'importation de déchets toxiques, dangereux ou non, tenant ainsi un engagement électoral sur un sujet très sensible en Albanie. En novembre 2011, le gouvernement de centre droit de Sali Berisha avait autorisé l'importation de 55 produits toxiques, provoquant la fureur des organisations de défense de l'environnement.
«Recette pour un désastre»
L'Alliance contre l'importation de déchets (AKIP) avait réuni plus de 64 000 signatures (au-delà de la barre des 50 000 nécessaires), afin d'exiger un référendum sur la question des déchets toxiques. La Cour constitutionnelle avait jugé cette pétition valide. Le référendum devait être organisé fin décembre. C'était avant l'interdiction décidée par le gouvernement Rama.
«Celui-ci est aujourd'hui face à une contradiction majeure, souligne Blendi Kajsiu, l'un des représentants de l'AKIP. En Albanie, les gouvernements ont tendance à être serviles vis-à-vis des alliés occidentaux, américains ou européens. Ils cherchent leur légitimité à l'extérieur. Mais qui prend en compte dans ce cas les intérêts albanais ? Vu les faibles capacités administratives de notre Etat et le haut danger de l'arsenal syrien, on aurait la recette pour un désastre.»
Le 15 mars 2008, une explosion dans un dépôt de munitions situé dans le village de Gerdec, près de Tirana, avait fait 26 morts et des centaines de blessés. Une société américaine avait la charge de détruire ces stocks de munitions anciennes, en partenariat avec le ministère de la défense.
Côtés Français et Belges, le savoir-faire est également avéré et remonte à la Première Guerre mondiale. Des sites spécialisés existent d'ailleurs dans les deux pays. Toutefois, Paris ne confirme pas avoir été sollicité pour accueillir la destruction de l'arsenal chimique syrien.
Source : sites web et rédaction french.alahednews.com
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