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1 oct. 2012

Huit raisons de refuser le traité budgétaire

La marche nationale ce dimanche 
à Paris contre 
la ratification 
du TSCG se veut 
une démonstration de résistance aux logiques libérales.

Combien seront-ils, dimanche, d’empêcheurs de tourner en rond ? À l’heure où l’Élysée comme Matignon entendent refermer au plus tôt la page du traité européen, pressés qu’on ne leur impute plus une aggravation de la crise, voilà que la mobilisation nationale contre « l’austérité permanente » étire le temps au contraire. Collectifs locaux, rencontres, débats – la Fête de l’Humanité en a pris sa part – entendent poser les bonnes questions. Ci-contre, l’Humanité apporte un florilège de réponses à tout ce qu’est le TSCG et que vous ne lirez guère ailleurs, quand 65 % des Français sondés par Harris Interactive pour l’Humanité Dimanche se prononcent pour la consultation populaire.


1. Sur le fond du traité, le président Hollande 
bien moins exigeant que le candidat François

François Hollande, can- didat en campagne, ne trouvait pas de mots assez forts contre le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), écrit à quatre mains par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. « Je renégocierai le traité européen issu de l’accord du 9 décembre 2011 en privilégiant la croissance et l’emploi, et en réorientant le rôle de la Banque centrale européenne dans cette direction », promettait le onzième de ses 60 engagements. Il s’était fait plus précis : sans la création d’euro-obligations, sans une redéfinition du rôle de la Banque centrale européenne et sans mesures de relance, le pacte budgétaire serait jugé « inacceptable ».

Le sommet européen des 28 et 29 juin, celui d’un bras de fer annoncé entre le désormais président de la République Hollande et Angela Merkel a donc éveillé de grandes attentes. À sa sortie pourtant, seul un petit ajout, survendu sous le nom de « pacte de croissance » (lire page 5). Plus de traces des deux autres revendications sur le rôle de la BCE et les eurobonds. Quand au texte du traité lui-même, pas une ligne n’en a changé. À tel point que, mercredi, lors de l’audition de Pierre Moscovici et de Jérôme Cahuzac à l’Assemblée nationale à propos de la traduction du pacte en législation nationale, le président de la commission des Finances, Gilles Carrez (UMP), exultait : « Je me croyais revenu à l’an dernier. »



2. Les peuples et les Parlements placés 
sous la tutelle des commissaires de Bruxelles

À écouter les partisans du pacte budgétaire, celui-ci serait en fait plus « souple » que les traités existants, qui fixaient un seuil de déficit public réputé obligatoire à 3 % maximum du PIB de chaque État concerné – dans les faits, largement dépassé par la plupart des États. En avançant le principe d’un seuil de déficit « structurel » inférieur à 0,5 % du PIB à moyen terme, celui-ci se distinguerait du « déficit nominal » – le solde effectif entre dépenses et recettes – qui pourrait temporairement dépasser les 3 % de PIB en cas de fragilité générée par des « circonstances exceptionnelles », ou de « grave récession économique ». Au lieu de souplesse, le traité impose en fait un véritable carcan aux États pour au moins deux raisons.
La première, c’est que la notion de « déficit structurel » implique que les États doivent s’attaquer aux « structures » de la dépense publique, indépendamment des circonstances économiques, c’est-à-dire à l’emploi public et au périmètre même de l’intervention publique, pour tenir les objectifs.
La seconde raison est l’intervention de mécanismes de sanctions désormais automatiques en cas de « déficits excessifs », si l’État n’obtempère pas aux avertissements de la Commission européenne dès que la différence entre le déficit « nominal » ou « structurel », dépasse de 0,5 % du PIB sur un an (0,25 % deux ans de suite) les objectifs définis.



3. Plutôt qu’un traité qui éloigne de l’Europe, 
un non fondateur qui en rapproche

Comme durant la campagne référendaire de 2005 sur le traité constitutionnel européen, les défenseurs du pacte budgétaire européen expliquent qu’il n’y a pas de « plan B » à son adoption et promettent la dislocation de la zone euro si le traité est refusé. Ainsi du chef du gouvernement, Jean-Marc Ayrault, qui critiquait récemment la décision de la direction d’Europe Écologie-les Verts de rejeter le traité : « Nous, nous allons jusqu’au bout de la défense de l’euro. (...) Nous ne prendrons jamais la responsabilité de laisser disparaître l’euro. »

La ratification du traité en l’état ou le chaos : tel serait le marché entre les mains des parlementaires et du gouvernement français ! En vérité, ce sont les politiques d’austérité imposées par le traité qui poussent les peuples à rejeter l’Europe telle qu’elle se construit, tandis que la monnaie unique est minée par les difficultés économiques supplémentaires issues de cette austérité et sur lesquelles s’enrichissent les spéculateurs. Une autre voie existe : celle d’une renégociation véritable et en profondeur du traité européen, comme y invitait le candidat François Hollande lui-même durant la campagne présidentielle en déclarant, le 17 mars, à Paris : « Je ne serai pas seul parce qu’il y aura le vote du peuple français qui me donnera mandat. » Un non majoritaire au traité actuel donnerait ce mandat et cette force à François Hollande.



4. Le pacte budgétaire va creuser la dette au lieu de la réduire, enfonçant l’Europe dans la crise

Le pacte budgétaire européen serait l’outil indispensable au redressement des finances publiques et à la résorption de la dette des États de l’Union, préalable indispensable pour rétablir la confiance des marchés dans l’euro et la capacité des États à se financer à des taux acceptables. « Notre devoir, c’est de réduire le déficit. Non pas pour l’idée qu’il faudrait réduire le déficit en soi, mais parce que c’est la condition pour maîtriser la dette et donc pour assurer notre souveraineté, expliquait François Hollande, le 31 août, à Châlons-en-Champagne. Le sérieux budgétaire, c’est la condition pour ne pas être dans la main des marchés financiers. »

A priori, personne n’est contre réduire les déficits pour diminuer dans le budget le poids des intérêts de la dette. Tout dépend de la manière dont on compte s’y prendre, dans le contexte de crise et de récession qui met durement à mal les recettes publiques. Or, de nombreux économistes mettent en garde contre les effets contre-productifs des plans d’austérité : au lieu de permettre un redémarrage de la croissance, ils la plombent par les restrictions imposées à la population, entraînant une nouvelle dégradation de la conjoncture économique, qui génère en retour une baisse des recettes publiques, et donc un creusement des déficits, et ainsi de suite. La preuve par la Grèce, qui en est à son neuvième plan d’austérité, dont les effets successifs ont fait passer la dette du pays de 175 à 365 milliards d’euros.



5. Le traité Sarkozy revendiqué par la droite,
qui votera aux côtés du gouvernement

« Nous voterons le traité européen et nous voterons la loi organique. » Le président du groupe UMP à l’Assemblée nationale, Christian Jacob, sur la même ligne que les ténors socialistes ? Si sa justification embarrasse la majorité, elle conforte les tenants du non en pointant la filiation entre le traité Sarkozy-Merkel et le TSCG : « Ce traité nous convenait sous Nicolas Sarkozy, le même traité avec François Hollande nous convient. » Jean-François Copé et François Fillon oublient même leur rivalité quand il s’agit de soutenir « la rigueur budgétaire ». « Ce traité, c’est celui auquel on croit, qui permet de nous sauver de la crise. »

La droite appuie là où ça fait mal, se vengeant au passage de la défaite à l’élection présidentielle en attaquant « l’imposture » Hollande. Le secrétaire général de l’UMP rappelle la promesse du candidat : « S’il était élu, il ne demanderait pas la ratification du traité UE et de la règle d’or. » Or, pointe perfidement Jean-Louis Borloo, président de l’Union des démocrates et indépendants (UDI) : « François Hollande n’a évidemment aujourd’hui pas d’autre choix que de soumettre au vote du Parlement le traité européen négocié et élaboré par Nicolas Sarkozy et les exécutifs gouvernementaux européens. » Un texte qui « n’a pas changé d’une virgule », remarque Jean-Christophe Lagarde, président du groupe centriste de l’UDI. « Ceux qui, avant l’élection (présidentielle), disaient qu’il n’était pas bon, demandent aujourd’hui de l’adopter. Il y a ceux qui sont restés en cohérence, les Verts et le Front de gauche et une partie du PS, puis ceux qui ne sont pas cohérents. »



6. Dans la suite du pacte euro plus,
 le modèle social européen mis en cause

Dans son préambule, le texte du traité situe les dispositions envisagées concernant les finances publiques comme un aboutissement des accords déjà conclus par les pays de la zone euro, notamment du pacte euro plus du 25 mars 2011. Un pacte concocté également par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, qui révèle l’ampleur du dispositif austéritaire envisagé. Il ne concerne pas que les finances publiques, il ambitionne detransformer profondément le modèle social européen et menace, de ce fait, les salariés et tous ceux qui vivent de leur travail.

Le paragraphe 2.2.a. de ce pacte euro plus envisage ainsi de mettre les salaires sous surveillance car « des augmentations importantes et soutenues peuvent indiquer l’érosion de la compétitivité ». Pour éviter cela, il préconise « un réexamen des dispositions de fixation des salaires afin d’accroître la décentralisation dans le processus de négociation », tout cela afin de « veiller à la modération salariale ». Il réclame, notamment, une mise en cause des « restrictions disproportionnées sur les heures d’ouverture » dans le commerce, appelle à des « réformes du marché du travail, pour promouvoir la flexicurité », à un déplacement de « la fiscalité du travail vers la consommation par la fiscalité indirecte ». Par ailleurs, un règlement du Parlement et du Conseil européens du 16 novembre 2011 prévoit, lui aussi, la mise sur pied d’un dispositif d’alerte sur « la variation sur trois ans des coûts salariaux unitaires nominaux, avec un seuil fixé à + 9 % pour la zone euro ».



7 Comment réorienter l’Europe avec les mains liées par la règle d’or ?

Peut-on réorienter l’Europe en s’affranchissant du carcan austéritaire ? Pas pour les dirigeants socialistes, Jean-Marc Ayrault en tête. Le premier ministre argumente à la hache : la « conséquence logique » de la démarche de ceux qui, à gauche, ne veulent pas de la ratification du traité est « la sortie de l’euro ». Selon lui, si le traité n’est pas adopté, cela ouvrirait « une crise politique en Europe ». Comme si elle n’avait pas déjà lieu.

François Hollande s’était engagé à renégocier le traité ? Le premier ministre théorise après coup ce manquement à la parole donnée, conditionnant toute « réorientation politique » à l’adoption du pacte budgétaire. « Pour que l’Europe ne soit pas une contrainte, mais à nouveau l’espoir de tous les peuples », ajoutait-il sans rire. « Un début de commencement de réorientation de l’Europe », avance prudemment la députée PS Élisabeth Guigou. Elle le sait : si le traité était ratifié, il entérinerait une politique basée sur la limitation du budget. La fameuse règle d’or. La mise en garde d’Ayrault est un non-sens, selon Attac, qui retourne l’argument : le rejet « permettrait au contraire de rouvrir le nécessaire débat » de la réorientation européenne, sur d’autres bases. « Nos concitoyens attendent du gouvernement qu’il respecte ses engagements pour une réorientation sociale et démocratique de l’Europe », prévenait le député PCF-Front de gauche du Puy-de-Dôme, André Chassaigne, mardi, à l’Assemblée nationale.



8. Un « front du non » large
 pour « briser le mur du silence »

La manifestation de dimanche peut-elle faire plier le gouvernement, qui avance avec la volonté inflexible de faire ratifier le pacte par le Parlement ? Le premier enjeu est de « briser le mur du silence », rappelle le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent. D’abord pour interpeller les parlementaires : la position des Verts a été prise dans un élan « facilité par l’ampleur de la préparation de la manifestation », analyse Jean-Luc Mélenchon (l’Humanité du 26 septembre) .

La prise de conscience des citoyens se fera plus facilement si la manifestation est un succès. Les initiatives locales contre la ratification du traité étaient nombreuses, mais la couverture médiatique bien mince. Un rassemblement visible dans la capitale ne saurait être passé sous silence. Dans cette optique, les organisateurs veulent montrer un « front du non » regroupant « des forces de plus en plus larges », afin d’inciter « le peuple à se mêler de ses propres affaires », selon l’expression de Jean-Luc Mélenchon. En ligne de mire, la « bataille pour un référendum », portée par une partie des signataires de l’appel à manifester. Une bataille « dans la durée », selon Pierre Laurent, qui ne s’arrête pas au débat parlementaire et verra la naissance de « fronts contre l’austérité ». « On ne doit jamais renoncer à l’espérance démocratique », martèle Jean-Luc Mélenchon.

Source : l'Humanité. 

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