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30 déc. 2011

Votre génome complet séquencé pour Noël 2012

INTERVIEW - Une firme américaine propose de décrypter votre génome.
Séquençage de génome sur écran. Chaque ligne représente une sequence d'un segment de gène.
 Crédits photo : Henrik SPOHLER/LAIF-REA/Henrik SPOHLER/LAIF-REA

Complete Genomics, une société américaine, proposera dans quelques semaines de séquencer, moyennant finances, le génome de tout individu prêt à payer pour cela. Le 19 décembre dernier, les promoteurs de cette entreprise ont présenté lors d'un séminaire de la fondation Imagine à l'hôpital Necker les derniers développements techniques de leur stratégie. Pour l'instant, ils travaillent pour des laboratoires et des services de génétique. Ils s'investissent aussi dans des programmes de recherche. Ils viennent de décrypter complètement les gènes de plus de 1000 individus. À quoi cela peut-il servir au plan individuel? Le professeur Stanislas Lyonnet (service de génétique médicale de l'hôpital Necker à Paris) répond à nos questions.

LE FIGARO. - Peut-on vraiment disposer de son génome complet?

Stanislas LYONNET. - Il est aujourd'hui possible pour certaines entreprises de proposer le séquençage de l'ensemble des gènes d'un individu (son «exome»), pour quelques centaines de dollars ou d'euros, voire de son génome complet pour quelques milliers! À n'en pas douter, les coûts vont continuer à diminuer de manière exponentielle, jusqu'à remettre en cause les stratégies habituelles de la médecine génétique: ainsi il sera bientôt plus facile de séquencer l'ensemble des gènes d'un individu pour lequel on se pose la question d'une altération génétique à l'origine d'une maladie plutôt que de séquencer le gène, ou la poignée de gènes déjà connus, c'est-à-dire ceux dont on a fait la preuve qu'ils peuvent être impliqués dans telle ou telle maladie.

Quelles informations personnelles tirer de ces tests génétiques?

Au tout premier plan, ces informations peuvent être tournées vers la possibilité de ce qu'il est convenu d'appeler une médecine génomique personnalisée, idée selon laquelle la connaissance intime de la séquence du génome pourrait permettre de mieux comprendre et traiter les maladies au plan individuel. C'est aussi là l'enjeu d'une certaine médecine prédictive, vieux mirage, qui pourrait bien prendre quelques allures de vérité: mettre en garde ou proposer des stratégies préventives du fait de variations de génome qui prédisposeraient à tel ou tel risque.

Pourtant, cette question du risque est encore intensément débattue. Les grandes études dites «génome entier» de ces dix dernières années ont globalement échoué à mettre en évidence des facteurs de risque génétiques détectables, reproductibles et utilisables en clinique quels que soient les domaines de la santé concernés, maladie cardio-vasculaire, cancer… Aujourd'hui, le séquençage à haut débit de très nombreux individus va transformer ces approches et, espérons-le, en faire aboutir certaines.

Toujours sur un plan personnel, l'enjeu concerne la pharmaco-génomique, c'est-à-dire au fond la possibilité de mieux comprendre la réactivité, la sensibilité ou la résistance aux médicaments et autres traitements. Cet angle de la médecine est particulièrement important puisqu'il devrait idéalement aboutir à une adaptation thérapeutique individuelle non seulement fondée sur la juste prescription, mais aussi sur la meilleure prédiction de la sensibilité à un traitement ou de la toxicité d'un médicament. L'une des premières applications de la pharmaco-génomique concerne le traitement des cancers. Les cancers sont caractérisés par de nombreuses mutations acquises au cours du processus tumoral dont l'identification peut conduire au développement de thérapies ciblées. À l'inverse, identifier chez un patient les mutations caractéristiques du cancer dont il est atteint va permettre de guider son traitement

Au plan de la recherche, est-ce que le fait de disposer du génome de milliers de personnes peut faire évoluer vraiment la connaissance sur les maladies?

Incontestablement, le séquençage à haut débit d'un grand nombre d'individus est à même de produire une véritable révolution des connaissances dans le domaine des maladies génétiques. Cela est particulièrement vrai pour les maladies rares où l'on a plus de facilité à faire la preuve qu'un variant génétique est bien à l'origine de symptômes (le phénotype) d'un patient.

Bien que plus délicats à prédire, je suis convaincu que des progrès tout aussi déterminants seront accomplis dans le cadre des maladies communes (maladies cardio-vasculaires, cancers, maladies neurodégénératives ou métaboliques par exemple) pour lesquelles les modèles génétiques sous-jacents restent encore mystérieux.

Nous avons longtemps vécu avec l'hypothèse que c'était la combinaison délétère de variations génétiques par ailleurs communes qui finissait par aboutir à une prédisposition à ces maladies; aujourd'hui, d'autres hypothèses d'architecture génétique des maladies communes émergent des données de séquençage. Il en est ainsi de l'hypothèse d'une extrême hétérogénéité, qui reposerait sur le fait qu'un très grand nombre de gènes indépendants puissent être altérés par des variants individuellement rares, présents dans une combinatoire très variable suivant les cas, et donc indétectables par les méthodes jusque-là mises en œuvre dans ce type de maladies.

Ce déferlement de données devra aussi permettre ultimement, à mes yeux, de définir la part de l'origine de nos maladies qui n'est pas d'origine génétique. L'ambition n'est pas de régler «d'un tour de génome» la querelle de l'inné et de l'acquis, mais de dire ceux des facteurs de prédisposition à une maladie qui ne sont pas d'origine génétique et qui, par conséquent, sont bien plus accessibles à des mesures de prévention et de traitement.

LeFigaro.fr

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