Les résultats des élections législatives, en Turquie, témoignent d’un échec, pour l’AKP du Président Erdogan, qui perd la majorité absolue, et d’une victoire surprenante, pour les Kurdes.
Le quotidien libanais "As-Safir" a publié un article, pour examiner les différents aspects de l’échec du Président Recep Tayyip Erdogan et de son AKP, (Parti pour la justice et le développement), aux élections législatives de dimanche, en Turquie.
Nous reproduisons ici un extrait de cet article.
Aux élections parlementaires de dimanche, le Président Recep Tayyip Erdogan a reçu plusieurs gifles, à la fois. Les électeurs turcs ont fait descendre l’AKP de sa tour d’ivoire, et ont asséné des gifles au Président Erdogan. La première était celle de l’échec du parti conservateur d’Erdogan, qui a perdu sa majorité absolue, au Parlement turc, ce qui signifie que l’AKP ne pourra plus former le gouvernement tout seul. Il doit se résigner à former un gouvernement de coalition ou à tenter sa chance, dans des élections anticipées.
La deuxième gifle qu’a prise Erdogan est celle de l’échec de son projet de changer le système politique de la Turquie, pour passer du régime parlementaire au système présidentiel, pour devenir un super président ayant des prérogatives élargies.
La troisième gifle est celle de la fin d’une époque, qui a duré, pendant près de 15 ans, (depuis 2002), où l’AKP de Recep Tayyip Erdogan avait pris l’habitude de gagner toutes les élections parlementaires, présidentielles, régionales et municipales, de manière quasi-exclusive. Mais, maintenant, il semblerait que le processus de l’échec et du recul commence, pour l’AKP, qui a obtenu, dimanche, 41% des voix, contre 49.8%, lors des dernières élections législatives, (2011).
Mais la gifle la plus douloureuse, qui a surpris, grandement, le Président Erdogan, est, sans doute, celle de la réussite spectaculaire des Kurdes, aux élections parlementaire de dimanche. Les Kurdes étaient, essentiellement, représentés à ces élections, par les candidats du Parti démocratique des peuples. Le leader de ce parti, Selahattin Demirtas, a fait preuve d’un courage extraordinaire, car il a fait entrer son parti, dans la campagne électorale, en établissant des listes auxquelles ne participait aucun candidat indépendant. Il a réussi, ainsi, à dépasser la barre des 10% des voix, pour permettre au plus grand Parti politique pro-kurde de la Turquie d’obtenir des sièges, pour la première fois, au parlement.
Après la décompte de 97% des votes, les résultats préliminaires ont montré que l’AKP du Président Recep Tayyip Erdogan a obtenu 40.84% des voix, ce qui signifie un recul de près de 9%, par rapport à son score, lors des dernières élections législatives de 2011. Ainsi, il manque 16 sièges à l'AKP, au Parlement, pour pouvoir former un gouvernement indépendant.
Le Parti républicain du peuple a obtenu 25.13% des votes, accusant un recul de 1%, par rapport aux résultats de ce parti, en 2011. Le Parti de l’action nationaliste, (droite), a obtenu 16.43% des votes, et a amélioré son score de 3%, par rapport aux élections parlementaires de 2011. Mais le véritable vainqueur est, probablement, le petit parti pro-kurde, le Parti démocratique des peuples, qui obtient un score record de 12.84%, sachant qu'un parti doit obtenir, au moins, 10 % des voix, pour entrer au Parlement.
Plus de 54 millions de Turcs avaient les conditions requises, pour voter. Plus de 46 millions de citoyens se sont présentés aux urnes, ce qui signifie que le taux de participation était de 86%. D’après les résultats préliminaires, les sièges du Parlement seront répartis, ainsi : l’AKP du Président Erdogan, (258 sièges), le Parti républicain du peuple- gauche, (132 sièges), le Parti de l’action nationaliste-droite, (82 sièges), et le Parti démocratique des peuples –pro-kurde, (78 sièges).
On peut, ainsi,dire que les élections législatives de Turquie ont été marquées par ce que nous pourrons appeler un «coup d’Etat kurde». Il y a deux raisons, pour soutenir cette affirmation : en premier lieu, le Parti démocratique des peuples est le premier parti politique pro-kurde, qui gagne des sièges du Parlement de la Turquie, car, auparavant, les représentants kurdes obtenaient des sièges du Parlement, en tant que candidats indépendants. En second lieu, le nombre élevé de votes que le Parti pro-kurde a obtenu, à ces élections, a joué un rôle essentiel, dans l’échec d’Erdogan et de son AKP. Autrement dit, le Parti démocratique des peuples a gagné autant de voix que l’AKP d’Erdogan a perdues.
Si nous utilisons le terme «coup d’Etat», c’est pour indiquer qu’avec 43% ou 44% des votes, l’AKP ne pourra plus former un gouvernement indépendant. Ce parti sera obligé d’accepter «l’humiliation» de former un gouvernement de coalition. En outre, affaibli par les résultats du scrutin, l’AKP ne pourra plus continuer à faire cavalier seul, en matière de la politique intérieure et de politique étrangère, car les opposants à ces politiques participeront, cette fois-ci, au gouvernement. L’autre scénario que l’on peut envisager, pour la Turquie, c’est la possibilité d'élections législatives anticipées, en automne 2015, ou l’année prochaine.
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