L'évolution des événements dans la région et au monde, ainsi que l'accélération des activités terroristes en Egypte, ne permettent pas au Caire de poursuivre les politiques défaitistes héritées depuis la fin de l'ère nassérienne. Le but de la visite effectuée dernièrement par Poutine en Egypte est de l'appeler à récupérer sa place de poids sur la scène régionale et internationale.
L'Egypte a son Nil éternel. Elle a sa civilisation ancienne avec tout ce qu'elle comprend en matière de pyramides, d'obélisques et de stèles. Elle a sa place prééminente parmi les Arabes et beaucoup d'autres nations dans les domaines de la culture et de l'art. Elle beaucoup d'autres sources d'où elle peut tirer son sentiment de grandeur et d'importance. L'Egypte de l'ère nassérienne a vu s'attacher à son nom de grands exploits comme le fait d'avoir brisé le monopole des armes par les Occidentaux, Bandung et le non-alignement, le Haut barrage d'Assouan, la nationalisation du canal de Suez et la résistance face à l'agression tripartite. C'est à elle que revient le mérite d'avoir été la première à tenter le rêve de fonder une unité arabe hostile aux plans hégémoniques israélo-américains. Dans tous ces exploits, la Russie de l'ère soviétique a eu une participation active.
Présence prégnante de l'ère nassérienne
Lorsque, représentée par son président Vladimir Poutine, la Russie de l'heure actuelle se réunit à l'opéra du Caire, avec l'Egypte de l'heure actuelle, représentée par son président Abdul-Fattah as-Sissi, pour assister ensemble, à un spectacle qui retrace, avec un style artistique grandiose, l'histoire des relations russo-égyptiennes, ce qui se passe effectivement est une façon de rendre hommage à ces relations. Et ce que l'on retrace n'est que l'avenir de ces relations à la lumière de ce passé retracé.
En d'autres termes, et sous un angle purement objectif, ce qui fut commun à la Russie soviétique et à l'Egypte nassérienne l'est toujours à la Russie de Poutine et à l'Egypte de Sissi.
En Effet, Poutine cherche à recouvrer le rôle perdu par la Russie suite à l'effondrement de l'Union soviétique. Une telle entreprise passe inévitablement par la confrontation avec l'axe de l'hégémonie israélo-américain.
Quant à Sissi, on ne peut que supposer qu'il devrait faire face aux problèmes qui sont à l'origine de la mauvaise situation de l'Egypte sur les plans socioéconomiques et politiques. Ou, du moins, (il faut ici donner aux choses leurs vrais noms) qu'il tient à préserver son propre régime. Il va de soi que la réalisation de l'un et de l'autre de ces deux objectifs passe inévitablement par la confrontation avec l'axe israélo-américain.
Pourtant, ce qui est commun aux deux pays ne signifie nécessairement pas que les deux présidents perçoivent sous un même angle la façon d'agir pour résoudre les problèmes. Alors que Poutine est entré effectivement dans une lutte sans merci avec l'Occident, Sissi paraît plus enclin à adopter une politique de détente avec toutes les parties sur les deux scènes, régionale et internationale, et ce à commencer par les traités du Camp David auxquels il parait tenir jusqu'à présent, et à finir par sa sympathie affichée pour les pays du Golfe en passant par sa relation quelque peu brumeuse avec Washington.
Tout cela se reflète clairement au niveau de sa position héritée de son prédécesseur et ennemi juré, Muhammad Morsi, en ce qui concerne le dossier syrien.
Il va de soi que les positions de Sissi ne pourront rester aussi stables que le cours des eaux dans le Nil. Même s'il le désirait, la situation explosive dans la région l'obligera à renoncer à son désir. En vérité, les incendies de la guerre contre la Syrie, incendies qui ne se limitent pas à l'intérieur des frontières syriennes, ont commencé à atteindre la "jellabiyya" égyptienne.
Les issues salutaires
Des menaces qui guettent la part de l'Egypte dans les eaux du Nil, aux tensions quotidiennes sur les frontières égyptiennes avec la Lybie, aux attentats et assassinats quotidiens au Sinaï et autres régions égyptiennes, à la discorde sectaire qui gronde partout dans les villes égyptiennes, il n'y a plus lieu de ne pas s'apercevoir du fait que l'Egypte est directement visée, tout comme les pays de l'axe de la Résistance, par le terrorisme israélo-américain. Et tout comme la Chine et la Russie par les plans hégémoniques.
Certes, le président russe ne s'est pas déplacé en Egypte pour se promener et se distraire. Il a dans son cartable des propositions concernant le rejet du dollar et l'usage des deux monnaies, la russe et l'égyptienne, dans les échanges commerciaux entre les deux pays. Il y a une forte présence de la nécessité d'arriver à une solution en Syrie, surtout que la Russie et l'Egypte parrainent, chacune de son côté, des négociations à ce sujet entre les partie du conflit interne syrien. Il y a également des discussions concernant l'armement qui sont liées ou non à l'accord signé en septembre par les deux pays et portant sur l'achat d'armes russes à environ quatre milliards de dollars que le Royaume saoudite s'est engagée de payer avant que toute l'affaire ne soit plus ou moins oubliée. Il y a aussi un accord concernant la construction par la Russie d'une centrale nucléaire dans la localité "Dhab'a" en Egypte.
Et il y a surtout et avant tout une tentative de Poutine visant à faire revenir l'Egypte à sa place perdue en tant que le plus grand pays arabe et l'un des plus grands pays capables de jouer un rôle de poids quant à déterminer les sort des peuples du tiers-monde et du monde islamique. Il est naturel que ce retour ne soit possible qu'à travers son combat contre le terrorisme. Non à la manière de la lutte équivoque contre le terrorisme par la Coalition des puissances hégémoniques, mais par l'unification des fronts à partir du Sud-Liban jusqu'au Sinaï, en passant par le Golan, la Cisjordanie, Gaza et les frontières jordaniennes qui devraient faire partie de ces fronts.
Il n'est pas possible de deviner ce qu'allait être la position de Sissi. Toutefois, le salut de l'Egypte dépendra du rôle qu'elle jouera dans la lutte contre l'axe de l'hégémonie israélo-américain.
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