Les réseaux sociaux bruissaient d'indignation, lundi 13 mai : le groupe Bloomberg a indiqué vendredi avoir bloqué l'accès de ses journalistes à certaines données sur ses terminaux boursiers, après des plaintes de clients soupçonnant les reporters d'avoir utilisé ce canal pour enquêter sur eux.
LES MALADES : les journalistes de Bloomberg auraient espionné JP Morgan sur les terminaux pdt la Baleine de Londres businessinsider.com/bloomberg-news…
— Fabrice Pelosi (@fabricepelosi) 11 mai 2013
ChartGirl presents: I KNOW WHEN YOU LOGGED IN LAST SUMMER: The Bloomberg Spying Scandal. chartgirl.com/i-know-when-yo…#bloomberg
— Chartgirl (@_chartgirl_) 12 mai 2013
La société, fondée par l'actuel maire de New York, Michael Bloomberg, qui n'en assure plus la gestion au jour le jour en raison de ses activités politiques, combine une agence de presse et la fourniture d'informations financières sur des terminaux ad hoc.
Lire : New York : Michael Bloomberg, le business-maire
Sa messagerie est très utilisée par les traders pour communiquer entre eux. Les 2 400 journalistes de Bloomberg n'auraient pas eu accès à ces échanges, ni aux ordres donnés sur les marchés, qui transitent par des plateformes dédiées.
En revanche, ils peuvent savoir si quelqu'un est actif sur le terminal (ou depuis quand il ne l'est plus) et connaître une partie des données consultées (par exemple, une recherche sur les obligations d'entreprise, sans toutefois savoir quelles entreprises en particulier).
LA FED ET LE TRÉSOR DE LA PARTIE
Cette "transparence" règne depuis la création du service dans les années 1990 : "Nos journalistes peuvent depuis longtemps accéder à des données limitées sur les liens de nos clients à leurs terminaux", a déclaré vendredi un porte-parole de l'entreprise, Ty Trippet, en réponse aux premiers articles dans les médias. Et de préciser : "Cela n'a jamais concerné de données sécurisées des clients sur leurs positions, leurs transactions ou leurs messages."
Mais les données "basiques" quant à l'activité d'un opérateur boursier sur le terminal constituent déjà d'importantes sources d'informations, si elles sont recoupées avec d'autres (volumes d'échanges et cours d'un actif, rumeurs de rapprochement d'entreprises, départ d'un employé ou début d'"affaire"...).
Samedi, la Réserve fédérale (Fed) américaine indiquait avoir demandé officiellement des informations sur l'accès qu'auraient pu avoir des journalistes de l'agence relatives à l'utilisation par la banque centrale du terminal.
Selon le site Quartz, spécialisé dans le décryptage de l'actualité économique, les "chats" entre les techniciens chargés du support technique et les célèbres (mais débutants) utilisateurs du terminal faisaient l'objet de lectures amusées entre les employés. Le nom d'Alan Greenspan, ancien patron de la Fed, y est cité.
Le Trésor américain serait également concerné. Des activités de trading quotidiennes qui laissent songeur, commente le blog spécialisé ZeroHedge, quand on pense que ces institutions sont censées être composées d'économistes.
JPMORGAN ET GOLDMAN SACHS PARTIES CIVILES
C'est la banque d'affaires américaine Goldman Sachs qui aurait la première éveillé les soupçons en se plaignant, écrit le New York Post, de certaines questions posées par un journaliste de Bloomberg concernant l'activité d'un de leurs traders sur un terminal : pour Goldman, ces questions étaient trop bien informées.
JPMorgan s'est engouffré dans la brèche en faisant remarquer que Bloomberg avait été le premier à révéler le nom du Français Bruno Iksil derrière la "Baleine de Londres", responsable de pertes de trading de plusieurs milliards sur les dérivés de crédit il y a un an.
Samedi, le directeur général de Bloomberg, Daniel Doctoroff, a admis que l'entreprise avait commis une "erreur". Une erreur "inexcusable", selon le rédacteur en chef Matthew Winkler, qui s'est engagé lundi à ce que ses journalistes n'aient pas davantage d'informations que ses clients.
Cette affaire n'est qu'une illustration d'un des conflits d'intérêt possibles dans une entreprise où l'information financière (journalistes et analystes) côtoie l'activité financière (traders et investisseurs). En effet, les autres 12 600 employés de Bloomberg ont encore accès aux fonctions de recherche suspendues vendredi pour les agenciers.
Source : Le Monde
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