Qui peut le plus, peut-il le moins?
Ce questionnement, nous nous le sommes, déjà, posé, en d'autres occasions, et sur d'autres sujets, mais, quel qu'en soit le contexte, il reste pertinent.
En effet, la communauté, dite «internationale», qui s'inquiète des droits de l'Homme - certes, malmenés un peu partout, dans le monde - et des retombées - souvent dramatiques - des conflits sur les peuples, qui en sont victimes, n'éprouve, toutefois, aucune nécessité de mettre en cohérence ses actes et ses paroles.
Il en est, ainsi, de la Syrie, à laquelle a été consacrée une «conférence des donateurs» - 78 pays y participaient, accueillie, lundi et mardi, par le Koweït - afin de soulager, un tant soit peu, les souffrances d'un peuple piégé dans les engrenages d'une guerre, qui est loin d'être la sienne. Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'ONU - une institution otage des stratégies des grandes puissances - ne cachait pas sa «honte», face à l'échec de ladite «communauté internationale», en Syrie.
Il y a une semaine, devant le Sommet de la Ligue arabe, à Charm el-Cheikh, Ban Ki-moon s'exclama: «Je vous avoue ma colère et ma honte. Colère, en voyant le gouvernement syrien, les groupes extrémistes et les terroristes détruire, sans relâche, leur pays. Honte de partager la responsabilité de l'échec collectif des communautés internationale et régionale à agir, pour stopper, définitivement, le carnage», en Syrie.
Pouvait-il en être autrement, au regard des enjeux engagés par lesdites grandes puissances, pour asseoir leur prépondérance sur le monde, par conflits locaux et guerres de «basse» intensité interposés? Les «communautés» régionales n'ont-elles pas une implication flagrante, dans la mise à mort de la Syrie, qui ont soutenu - quand elle n'ont aidé ou financé - la rébellion contre le régime de Damas? Ne pas tenir compte de cette réalité, c'est, soit enfouir sa tête dans le sable, pour ne pas voir, soit ne pas avoir les moyens de dénoncer les destructeurs de la Syrie et les assassins du peuple syrien. Or, nombre de ces pays, qui ne veulent pas que du bien à la Syrie, siégeaient, (mardi), à la Conférence des donateurs de Koweït City, et M.Ban le sait mieux que quiconque, qui n'en demandait pas moins, au nom de l'Organisation des Nations unies, une aide humanitaire à la Syrie, qu'il chiffra à 8,4 milliards de dollars. Lors des deux précédentes conférences des promesses de dons de 1,5 milliard USD et 2,4 milliards USD ont été faites. Des promesses non tenues.
Certes, les promesses n'engagent que ceux qui y croient. Et l'ONU y croyait fermement. De fait, analystes et observateurs ont, surtout, retenu le chiffre «record», selon eux, de 8,4 milliards de dollars nécessaires, estime l'ONU, pour venir en aide à ce pays martyr.
Or, cette somme, qui paraît inhabituelle, pour les observateurs, n'est qu'une goutte, au regard des dépenses, autrement fabuleuses, des Etats-Unis, pour maintenir leur leadership, dont les guerres, en Irak et en Syrie, n'en sont qu'un des volets visibles, mais meurtriers, pour les peuples irakien et syrien.
En effet, l'ex-secrétaire à la Défense états-unien, Chuck Hagel, estimait - sur une base de dépenses moyenne, en septembre dernier - que les frappes, en Irak et en Syrie, valaient de 7 à 10 millions, par jour, soit 1 à 1,5 milliards, par mois, assurant: «Je dirais que cela va nous coûter entre 15 et 20 milliards de dollars, par an, ou entre 1,25 et 1,75 milliard, par mois». Les Américains, les Saoudiens, les Britanniques, les Français, sont prêts à dépenser des milliards de dollars et euros, pour asseoir leur position, mais répugnent à donner un milliard à un peuple.
La première conférence d'aide «humanitaire» à la Syrie, qui devait réunir, pour ce pays 1,5 milliard de dollars - donc, l'équivalent des dépenses mensuelles américaines, pour frapper ce même pays. Un comble! - n'a même pas pu en avoir la moitié. Une misère!
Or, selon l'ONU, quatre Syriens sur cinq vivent, désormais, dans la pauvreté, la misère et les privations, l'espérance de vie a chuté de façon sévère, en quatre ans de guerre, qui était de plus de 79 ans, en 2010, pour tomber à 56 ans, en 2014, dans le temps où l'économie syrienne perdait plus de 200 milliards de dollars, et la Syrie, quatre décennies de développement. Des chiffres, non seulement, singuliers, mais aussi, perturbants. C'est le résultat obtenu par ceux qui ont suscité la rébellion - qui s'est accointée avec le terrorisme islamiste, sous l'oeil bienveillant de l'Occident et des monarchies - au prétexte d'ouvrir la voie à la «démocratie», pour la Syrie.
Et voilà que l'on fait appel à ceux qui ont détruit la Syrie, qui ont lancé son peuple, sur les chemins de l'émigration et de l'exil, à faire l'aumône au peuple martyr syrien. Grotesque! Or, ce qui arrive à la Syrie - et aussi, à l'Irak, à la Libye, au Yémen - n'est pas drôle. C'est dramatique. Et ce sont les pays qui sont derrière sa tragédie qui veulent aider le peuple syrien? Quel cynisme!
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