Patrick Mennucci, le candidat socialiste à la mairie de Marseille, a essuyé un sévère revers. Battu dans son propre secteur du centre, son parti ne dirige plus qu'une seule mairie de secteur dans la deuxième ville de France, dont Jean-Claude Gaudin (UMP) conserve la mairie pour un quatrième mandat consécutif.
Marseille compte une mairie Front national, dans le 7e secteur, depuis dimanche soir. Vous sentez-vous responsable ?
Patrick Mennucci : Absolument pas. J'ai dit que la gauche devait se maintenir dans ce secteur parce qu'elle avait les meilleures réserves de voix. Notre position finale, deuxième derrière le FN dans cette triangulaire, le prouve. C'était à l'UMP de se retirer. Et puis, on ne va pas recevoir de leçons de Jean-Claude Gaudin, qui, dans le passé, a gouverné la région Provence-Alpes-Côte d'Azur avec le FN. Evidemment, cela me touche que le FN prenne une mairie de secteur dans ma ville. Mais pas autant que l'état déplorable dans lequel se trouve ce secteur : pauvreté, misère, déculturation.
Après votre défaite au premier tour, vous avez pointé la responsabilité de la politique du gouvernement Ayrault. En quoi a-t-elle pesé ?
J'assume la responsabilité de l'échec. J'ai voulu une campagne claire en matière de programme, de changement. Et ce n'est pas ce que les Marseillais attendaient. Mais, là où l'écart est faible entre nous et l'UMP, je pense que c'est la politique nationale qui nous fait perdre. Elle m'a coûté, par exemple, mon secteur. Sur le terrain, on a toujours entendu les mêmes choses : les retraites taxées, le poids des impôts. Dans mon arrondissement, en centre-ville, il y a aussi eu la question du mariage pour tous. Pas chez des catholiques qui se seraient radicalisés – ceux-là ne votaient pas pour moi –, mais plutôt dans la communauté musulmane. Il y a eu une campagne assez dure menée sur le terrain. Des tracts avec ma photo en train de célébrer un mariage homosexuel ont été diffusés.
La sénatrice PS Samia Ghali dit que le gouvernement a pris « trop de mesures sociétales et pas assez de mesures sociales ». Etes-vous d'accord ?
Je ne dis pas que Samia Ghali a raison. Je confirme que ces mesures sur les grandes questions de société nous ont coûté des voix sur le terrain.
Pointer le gouvernement Ayrault alors qu'on a vu beaucoup de ministres à Marseille, n'est-ce pas de l'ingratitude ?
Je ne critique pas le gouvernement. Je l'ai défendu. Je parle juste de choses constatées pendant la campagne. Une défaite ne peut pas être aussi profonde et généralisée sans avoir de causes nationales.
Avez-vous attendu un remaniement plus tôt ?
C'est une erreur de ne pas avoir remanié deux mois avant le premier tour des municipales. Cela aurait peut-être modifié le regard des Français. Le rejet touche aussi la désorganisation du gouvernement, le manque de clarté de l'agenda et des objectifs.
Quel axe doit choisir le gouvernement Valls pour réconcilier les électeurs avec le PS ?
Il faut expliquer la difficulté dans laquelle on est, clarifier un agenda, se donner cinq ou six objectifs et s'y tenir. Arrêter avec les lois qui bouleversent la société. Je ne dis pas qu'il ne fallait pas faire le mariage pour tous. J'étais pour. Mais là, on doit se concentrer sur l'économique et le social.
Aucun vainqueur de primaires citoyennes n'a remporté sa municipale. Ce système d'investiture doit-il être abandonné ?
Dans les scrutins locaux, les tensions entre les individus sont beaucoup plus importantes qu'au niveau national. Les primaires municipales créent des incompréhensions, des tensions que l'on retrouve par la suite. J'ai soutenu les primaires parce que je ne voyais pas comment investir un candidat, à Marseille, sans passer par là. Même si, battu dans ces primaires, je n'aurais pas eu le même comportement que d'autres.
Avez-vous l'impression de ne pas avoir mené une équipe soudée dans cette campagne ?
Cela a été très difficile. Le rassemblement a pris beaucoup de temps. Chacun voulait faire fructifier des scores, qui n'étaient pas très bons. Je n'ai eu aucune latitude. Passer en force, dicter mes choix, aurait fait éclater l'union.
Aujourd'hui, les mêmes personnes doivent reconstruire le PS marseillais. Comment pouvez-vous y arriver ?
Cela passe par la dissolution des sections du PS de Marseille, qui sont, pour beaucoup, gangrenées par le clientélisme ou noyautées par Jean-Noël Guérini . Et par la réadhésion individuelle des militants, chèque en main, devant des délégués du parti. C'est la voie à choisir, même si nous ne devons rester que mille.
Pensez-vous que l'influence de Jean-Noël Guérini a été déterminante dans votre défaite ?
Son influence a été importante partout et déterminante, sûrement, dans le 2e secteur avec l'alliance entre Mme Narducci (PRG) et M. Biaggi (UMP). Il a pourri l'atmosphère de la campagne en poussant beaucoup de listes bidons. Nous sommes arrivés à un niveau inacceptable.
L'exclusion de Jean-Noël Guérini est-elle, pour vous, la pierre de base de la reconstruction du PS marseillais ?
Oui… J'ai donné quinze jours au Parti socialiste pour finaliser cette exclusion. C'est lui ou moi.
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