D'après Emmanuel Quidet, le président de la Chambre de commerce et d'industrie franco-russe, la Russie n'hésitera pas à prendre des mesures de réciprocité contre l'Europe. Et ça pourrait faire mal.
La menace de sanctions économiques que fait peser l'Europe sur la Russie inquiète les représentants des chefs d'entreprises français en Russie. Emmanuel Quidet, le président de la Chambre de commerce et d'industrie franco-russe revient sur les conséquences de telles décisions sur les économies des deux partenaires commerciaux.
Que représente économiquement la Russie pour la France ?
Les relations économiques sont très fortes entre la France et la Russie et elles se sont même considérablement approfondies ces dernières années. La France est ainsi devenue le 3ème investisseur étranger en Russie, derrière l'Allemagne et la Suède, alors qu'elle occupait la 9ème place en 2008. Au total, les investissements français en Russie représentent 12 milliards de dollars par an. Nous sommes présents dans beaucoup de secteurs différents. Par exemple, Renault, Peugeot, Danone et Total sont très actifs en Russie. Le pays représente également le 1er marché étranger pour les laboratoires Servier et Sanofi est le principal groupe pharmaceutique de Russie. Auchan est devenu le 1er employeur privé. La Société Générale, en rachetant Rosbank, la deuxième banque du pays, est également devenu un acteur majeur en Russie. Nous estimons qu'il y a environ 1.200 sociétés françaises implantées en Russie et 6.000 à 7.000 qui y exportent d'après les Douanes.
Craignez-vous des sanctions économiques de l'Union européenne contre la Russie ?
Oui, car pour punir la Russie, l'Europe va prendre des mesures qui vont affaiblir l'économie russe. Mais ce qui m'inquiète le plus c'est l'escalade qui pourrait avoir lieu si, en retour, la Russie applique des sanctions économiques à l'encontre de l'Europe. Si il y des mesures de réciprocité qui sont prises par la Russie, alors les conséquences pour l'Europe et la France pourraient être terribles. On peut tout imaginer.
Qui aurait le plus à perdre: l'Europe ou la Russie ?
C'est un jeu perdant-perdant mais je pense que c'est l'Europe qui aurait le plus à perdre de sanctions économiques car de nombreuses entreprises concernées par la Russie se retrouveraient alors en situation de surcapacité de production. Elles devront peut-être mettre du personnel au chômage ou fermer des usines. Selon moi, cela pourrait même entraîner la France dans la récession. Au final, il y a beaucoup plus d'investissements français en Russie que d'investissements russes en France donc le gel des avoirs dans les deux pays n'aura pas les mêmes conséquences. Et la Russie est prête à prendre ce risque même si les sociétés françaises en Russie représentent des emplois.
Est-ce que les patrons français en Russie sont inquiets ?
Pour le moment, le mot d'ordre est "on continue à faire des affaires, on arrête rien". A ma connaissance, il n'y a pas de projets qui ont été reculés ou annulés. Les gens continuent de développer leurs affaires. S'ils sont inquiets, ils attendent d'en savoir plus sur la nature des mesures de rétorsion prise par l'Europe contre la Russie. Il n'y a rien d'autre à faire pour le moment.
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