Blogger Tips and TricksLatest Tips And TricksBlogger Tricks

28 nov. 2014

À défaut de fuir, les chrétiens d’Alep s’accrochent à la foi

Le prêtre lors d’une communion dans une église d’Alep. 

« Malgré tout, nous ne quitterons pas notre terre, c'est impossible », assure un prêtre.

Dans l'église orthodoxe Mar Élias d'Alep, le diacre bénit avec son encensoir la centaine de fidèles tandis que les chants du chœur étouffent le bruit des bombes qui tombent à proximité.

Venues des différents quartiers sous contrôle du régime syrien, des familles se pressent à la messe chaque dimanche à 18h00 dans cette église tout illuminée, grâce à un puissant générateur, dans une métropole ravagée et quasiment privée d'électricité. « Beaucoup de coreligionnaires sont partis parce qu'ils ont perdu leur travail et surtout parce qu'ils sont affolés par Daech (acronyme en arabe de l'État islamique, ou EI) », assure Georges Bakhache, porte-parole des communautés chrétiennes d'Alep. « Les jihadistes ne sont pas dans la ville mais ils ne sont pas loin » et « les chrétiens ont paniqué après avoir vu ce qu'ont subi les chrétiens de Mossoul » lors de la prise de cette ville irakienne par le groupe ultraradical, indique-t-il. Représentant 10 % de la population, les chrétiens de Syrie et ceux d'Irak représentent les plus anciennes communautés chrétiennes du Proche et du Moyen-Orient


En Irak, « ils ont eu comme choix de se convertir, de payer la jizya (taxe autrefois imposée sur les non-musulmans en terre d'islam) ou de fuir. La quasi-totalité a choisi cette dernière option », explique M. Bakhache. Par répercussion, « cela a suscité l'épouvante chez nous et les chrétiens sont partis au Liban, en Suède, au Canada, en Amérique et en Arménie ». Si certains sont partis, M. Bakhache assure ne pas vouloir rejoindre ses frères et ses parents aux États-Unis. « Malgré tout, nous ne quitterons pas notre terre, c'est impossible », assure-t-il, son fils de deux ans dans les bras.

L'exode des Alépins, chrétiens et musulmans, a débuté après la prise par les rebelles de la moitié de l'ancienne capitale économique du pays en 2012. Selon le géographe français Fabrice Balanche, spécialiste de la Syrie, Alep ne compte plus qu'un million d'habitants sur les 2,5 millions qui y vivaient il y a deux ans. Quant aux seuls chrétiens, qui étaient 250 000, « plus de la moitié sont partis et il n'en reste que 100 000, dont 50 000 Arméniens », selon M. Balanche. « De nombreux chrétiens émigrés affirment que leur exil est temporaire, qu'ils rentreront au pays dès que la situation s'améliorera et qu'il y aura à nouveau du travail. Je suis sûr qu'un jour, ce sera le cas », affirme, confiant, Basile Chawa, qui possède un café juste derrière Mar Élias.


À l'église latine Saint-François, le père Imad Daher soutient que les chrétiens « seront toujours là dans 100 ans, car c'est notre terre et il n'y en a pas d'autres ». En cette période de fêtes, le prêtre annonce, « on fêtera Noël, même si nous sommes beaucoup moins nombreux. Nous célébrerons une messe de paix. Nous décorerons les arbres de Noël dans l'église et dans les maisons ». Il n'y aura en revanche pas de « décorations extérieures car beaucoup de sang a coulé. Il faut respecter les martyrs ». D'ailleurs, lui-même a été marqué dans sa chair, il se confie, « le 10 octobre 2012, à 22h00, un obus est tombé sur l'église de la Dormition. J'ai perdu un œil, une prothèse en plastique a remplacé ma joue et j'ai une barre de fer avec des vis dans mon bras ». Le père Daher poursuit : « J'ai été soigné au Liban puis je suis rentré car le berger n'abandonne pas son troupeau. Sinon, le loup viendra dévorer les moutons ou ils s'enfuiront. »

Les huit communautés chrétiennes vivent dans six quartiers gouvernementaux. Mais, de l' « autre côté », celui des rebelles, beaucoup ont fui à l'ouest. Il en reste une centaine dans le quartier kurde Cheikh Maqsoud et une poignée dans le secteur rebelle de Jdaidé, près de la ligne de démarcation. Dans ce quartier, sur la façade de l'église rattachée au Centre Saint-Élie pour personnes âgées, on peut lire : « Notre Seigneur Jésus-Christ, Écoute-nous. » À l'intérieur, le plafond est perforé, vraisemblablement en raison d'un bombardement. Il ne reste plus que six hôtes, d'âge avancé, les autres étant partis avec leurs familles dans les quartiers loyalistes, selon le responsable du centre, Abou Youssef : « Ils ne sont jamais revenus. »

Aucun commentaire: